Page:Goethe-Nerval - Faust Garnier.djvu/210

Cette page a été validée par deux contributeurs.

ment, tout le peuple se livre à la joie, l’or circule et afflue partout ; l’empire est sauvé.

— Quoi ! dit l’empereur, mes sujets prennent cela pour argent comptant ? L’armée et la cour se contentent d’être payées ainsi ? C’est un miracle que je ne puis trop admirer.

Ici, Méphistophélès, qui vient de jouer ce rôle de Law dans une cour du moyen âge, en inspirant ces idées au chancelier, développe la théorie des banques et du papier-monnaie ; et l’empereur, pour reconnaître le service que le docteur et lui viennent de lui rendre, les crée à tout jamais surintendants des finances et directeurs des mines dans toute l’étendue de ses possessions. Le fou qu’on avait cru mort, et que Méphistophélès avait remplacé, reparaît à la fin de cette scène. On lui apprend tout ce qui s’est passé, et l’empereur, joyeux de le retrouver vivant, le comble de richesses en papier. Le fou, seul de toute la cour, ne fait pas grand cas de ces billets de banque, et les veut faire servir à quelque usage inférieur. On se moque de lui, et on le laisse seul avec Méphistophélès, qui lui jure que ce papier vaut de l’or.

— Mais, dit le fou, me le changera-t-on bien contre de l’or ?

— Sans doute, tout de suite, dit Méphistophélès.

— Je vais le changer, dit le fou. Mais, avec de l’or puis-je acquérir comme autrefois une terre, une maison, un bois autour de la maison ?

— Sans nul doute.

— Je vais vite changer le papier contre l’or, et l’or contre la maison et la terre. Dès ce soir, je vivrai tranquillement dans ma propriété !

— Pas si fou ! dit Méphistophélès seul, en quittant la scène ; pas si fou !

Dans toutes ces scènes épisodiques, Faust a été presque oublié. Il reparaît dans la suivante avec ses désirs, son activité et ses poétiques aspirations de la première partie ; c’est pourquoi nous donnerons cette scène dans son entier.