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sort de bonne maison, comme on peut le lire sur son front… Il n’eût pas sans cela été si hardi.

Elle sort.
MÉPHISTOPHÉLÈS.

Entrez tout doucement, entrez donc !

FAUST, après quelques instants de silence.

Je t’en prie, laisse-moi seul.

MÉPHISTOPHÉLÈS, parcourant la chambre.

Toutes les jeunes filles n’ont pas autant d’ordre et de propreté.

Il sort.
FAUST, regardant à l’entour.

Sois bienvenu, doux crépuscule, qui éclaires ce sanctuaire. Saisis mon cœur, douce peine d’amour, qui vis dans ta faiblesse de la rosée de l’espérance ! Comme tout ici respire le sentiment du silence, de l’ordre, du contentement ! Dans cette misère, que de plénitude ! Dans ce cachot, que de félicité ! (Il se jette sur le fauteuil de cuir, près du lit.) Oh ! reçois-moi, toi qui as déjà reçu dans tes bras ouverts des générations en joie et en douleur ! Ah ! que de fois une troupe d’enfants s’est suspendue autour de ce trône paternel ! Peut-être, en souvenir du Christ, ma bien-aimée, entourée d’une jeune famille, a baisé ici la main flétrie de son aïeul. Je sens, ô jeune fille ! ton esprit d’ordre murmurer autour de moi, cet esprit qui règle tes jours comme une tendre mère, qui t’instruit à étendre proprement le tapis sur la table, et te fait remarquer même les grains de poussière qui crient sous tes pieds. Ô main si chère ! si divine ! La cabane devient par toi riche comme le ciel. Et là… (Il relève un rideau de lit.) Quelles délices cruelles s’emparent de moi ! Je pourrais ici couler des heures entières. Nature ! ici, tu faisais rêver doucement ange incarné. Ici reposait cette enfant, dont le sang palpitait d’une vie nouvelle ; et ici, avec un saint et pur serment, se formait cette image de Dieu.