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qui gazouille paisiblement dans les bosquets qui l’ont vu naître.

Quand elle entendit donc son cousin lui proposer M. Grimes pour mari, elle resta pour un moment muette de surprise ; mais, dès qu’elle eut recouvré la parole, elle répondit : « Non, monsieur, je vous remercie. Dieu merci ! je n’ai pas besoin de mari.

— Si fait, vous en avez besoin ! n’êtes-vous pas toujours à courir après les hommes ? Il est bien temps de vous établir.

— Et M. Grimes, encore ! Non, non, s’il vous plaît. Si j’ai jamais un mari, ce ne sera pas quelqu’un comme M. Grimes.

— Taisez-vous ! Comment osez-vous vous permettre de pareilles impertinences ?

— Mais, Seigneur ! je ne sais pas ce que vous voudriez que j’en fisse : c’est comme si vous m’ordonniez de prendre votre vilain barbet pour le mettre dans ma chambre, sur un beau petit coussin de soie : et puis, M. Grimes n’est qu’un simple artisan, et je suis bien sûre d’avoir entendu dire à ma tante que notre famille était une très-noble famille.

— Cela n’est pas vrai. Notre famille ! Avez-vous l’impudence de vous regarder comme de notre famille ?

— Hé ! comment ! est-ce que votre grand-papa n’était pas mon grand-papa aussi, monsieur ? Comment ne serions-nous donc pas de la même famille ?

— Pour une bonne raison. Vous n’êtes que la fille d’un coquin d’Écossais qui a mangé jusqu’au dernier shilling de la fortune de ma tante Lucy, et