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donner à cette succession d’événements toute la clarté possible, je joindrai au récit que me fit alors M. Collins divers éclaircissements que j’ai reçus d’ailleurs dans la suite. Au premier coup d’œil, le lecteur pourra croire que ces détails de la vie passée de M. Falkland sont étrangers à mon histoire. Hélas ! une cruelle expérience me fait sentir le contraire : en retraçant ses infortunes, mon cœur saigne comme si elles étaient les miennes propres. Comment pourrait-il en être autrement ? ma destinée tout entière a été liée à son histoire : c’est parce qu’il fut malheureux que mon bonheur, mon nom, toute mon existence ont été à jamais flétris.


II


Parmi les auteurs qui firent les délices de la première jeunesse de Falkland étaient les poètes héroïques de l’Italie ; c’est dans leurs ouvrages qu’il puisa l’amour de la chevalerie et des actes romanesques. Ce n’est pas qu’il n’eût trop de bon sens pour regretter le temps de Charlemagne ou d’Arthur ; mais en même temps qu’une dose de philosophie calmait son imagination, il se figurait que dans les mœurs dépeintes par ces poètes célèbres il y avait quelque chose à imiter aussi bien que quelque chose à éviter. Rien n’était plus propre, selon lui, à rendre un