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ses joues. Il n’osait pas tourner ses regards du côté de la salle où j’étais, ce qui donnait à sa contenance un air d’embarras et de contrainte. Mais, quand l’accusé vint à parler de ses propres sentiments, qu’il se mit à peindre la profondeur et l’amertume de ses regrets pour une faute involontaire, M. Falkland ne put pas y tenir davantage ; il se leva tout d’un coup et sortit brusquement de la salle avec tous les signes de l’horreur et du désespoir.

Cette circonstance fut assez indifférente pour l’affaire de l’accusé. Les parties restèrent environ une demi-heure à attendre. M. Falkland avait entendu lui-même ce qu’il y avait de plus essentiel dans les preuves. Cet intervalle écoulé, il envoya chercher M. Collins qui sortit de la salle. Les faits allégués par l’accusé étaient confirmés par beaucoup de témoins présents à l’événement. Il fut dit à l’assemblée que mon maître était indisposé, et en même temps la décharge de l’accusé fut prononcée. Néanmoins, à ce que j’appris par la suite, la vengeance du frère ne s’en tint pas là, et celui-ci trouva un magistrat ou plus scrupuleux, ou plus despotique, qui ordonna l’arrestation du prévenu.

Cette affaire ne fut pas plutôt terminée que je courus bien vite au jardin m’enfoncer dans un des bosquets les plus épais. Je sentais battre les veines de mon front ; j’étais haletant, et je ne me trouvai pas plutôt à l’abri de tous les regards, que mes pensées se firent passage malgré moi, et que, dans un accès d’enthousiasme que je ne pouvais contenir : « Voilà, m’écriai-je, voilà le meurtrier. Les Haw-