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une journée il se voyait assailli par tous les malheurs les plus redoutables pour lui : sa personne avilie par le dernier des outrages, sa réputation noircie du plus lâche de tous les crimes. Il aurait pu s’éloigner, car personne n’était disposé à poursuivre un homme aussi généralement adoré que M. Falkland, ou à venger un homme aussi généralement abhorré que M. Tyrrel ; mais il dédaignait de fuir. En même temps l’affaire était d’un genre trop grave, et le bruit, faute de contradiction, faisait d’un jour à l’autre trop de progrès pour qu’il ne prît pas un parti. Quelquefois M. Falkland paraissait disposé à adopter les moyens les plus propres à accélérer un jugement ; mais vraisemblablement il craignait qu’un recours de sa part aux voies judiciaires ne donnât plus de consistance à une imputation dont l’idée seule le faisait frémir ; en même temps qu’il était résigné à se soumettre à l’instruction la plus rigoureuse, et s’il ne pouvait espérer d’effacer de la mémoire des hommes le souvenir de l’accusation qu’il avait encourue, à obtenir au moins la démonstration la plus complète de son innocence. Enfin les magistrats du lieu se virent, malgré eux, dans la nécessité de faire quelques démarches. Sans décerner de mandat d’arrêt contre M. Falkland, ils lui firent dire qu’il eût à comparaître devant eux…. La procédure se trouvant ainsi entamée, M. Falkland leur fit entendre que si l’affaire ne devait pas avoir d’autres suites, il espérait qu’au moins ils donneraient à leur information toute la publicité possible. Aussi l’assemblée fut-elle nombreuse ;