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coups, néanmoins, n’atteignaient encore qu’une partie de la propriété de ce malheureux ; mais M. Tyrrel ne s’en tint pas là. Une mortalité subite se manifesta parmi les bestiaux de Hawkins, et elle était accompagnée de circonstances très-propres à faire naître des soupçons. Cet événement excita fortement la vigilance et l’activité de Hawkins, qui vint à bout de suivre si exactement le fil de la trame, qu’il ne douta pas de pouvoir le faire remonter jusqu’à M. Tyrrel lui-même.

Hawkins, qui savait bien que la loi était disposée de manière à servir plutôt d’arme offensive à la tyrannie des riches que de défense contre leurs usurpations, avait eu grand soin d’éviter jusqu’à ce moment d’en venir à des mesures judiciaires. Dans cette dernière circonstance, il se figura que le délit était d’une nature trop atroce pour que le rang du coupable, quel qu’il fût, pût le mettre à l’abri de la sévérité des lois. La suite lui fit voir qu’il avait à s’applaudir de sa première détermination, et il se repentit vivement de s’être laissé aller à en prendre une autre.

C’était là le point où l’attendait M. Tyrrel, et à peine put-il croire à sa bonne fortune quand on vint lui dire que Hawkins avait intenté une action contre lui. Sa joie en fut extrême, et il se félicita de voir que la ruine totale de son protégé était devenue immanquable. Il consulta son ancien attorney[1], et lui recommanda instamment de ne négliger dans

  1. Procureur.