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menait à la route, et la chasse des deux coursiers continua ainsi dans toute la longueur du bois.

À l’extrémité de ce bois il y avait une porte. Cette circonstance, que Grimes se rappela, adoucit son dépit, parce qu’il se regardait comme certain de mettre par là un terme à la course de sa victime fugitive, et qu’il n’était guère probable que dans le silence et les ténèbres de la nuit il y eût là personne pour l’interrompre. Cependant, par le plus grand hasard du monde, il se trouva un homme à cheval qui attendait à cette porte. « À l’aide ! au secours ! s’écria Émilie, au voleur ! au meurtre ! au secours ! » Cet homme était M. Falkland. Grimes reconnut sa voix, aussi ne résista-t-il que faiblement. Deux autres hommes, que l’obscurité l’avait d’abord empêché d’apercevoir et qui étaient des domestiques de M. Falkland, accoururent au bruit, alarmés pour la sûreté de leur maître ; et alors Grimes, voyant que sa proie lui était échappée, pressé par la crainte et la honte qui suivent le crime, prit la fuite sans dire un seul mot.

Il paraîtra peut-être étrange que M. Falkland se fût ainsi trouvé une seconde fois le libérateur de miss Melville, et cela au moment où on devait le moins s’y attendre. Rien n’est cependant plus aisé à expliquer. Il avait entendu dire qu’on avait vu rôder un homme dans ce bois pour voler ou pour quelque autre mauvais dessein, et qu’on conjecturait que cet homme était Hawkins, autre malheureuse victime de la tyrannie de M. Tyrrel, dont je vais bientôt parler, et