sorte de droit à ce sentiment ; d’une autre part, le renouvellement, sans aucun terme, peut-être même l’accroissement des maux que j’avais endurés. Mais cette affreuse perspective, je la préférais encore à un état d’incertitude. Je voulais pousser à bout le sort qui me poursuivait. Je voulais anéantir ce rayon d’espoir qui, tout faible qu’il était, avait si longtemps fait mon supplice, et, par-dessus tout, je voulais épuiser toutes les ressources qui étaient à ma disposition. J’étais dans un état qui tenait de la frénésie, L’agitation de mes pensées avait allumé dans mon corps une fièvre dévorante. Si je portais une main sur mon front ou sur ma poitrine, c’était un fer ardent que j’en approchais. Je ne pouvais rester un moment dans la même place. J’étais tourmenté sans relâche par le désir de voir arriver l’instant où cette terrible crise, que j’avais tant appelée de mes vœux, serait décidé.
Après l’intervalle de trois jours, il fallut paraître avec M. Falkland en présence du magistrat auquel je m’étais adressé pour ma déposition. On ne me laissa que deux heures pour me préparer, M. Falkland paraissant aussi impatient que moi-même de voir la cause portée à sa décision, et ensuite oubliée pour jamais. Avant le moment de l’information, j’eus occasion d’apprendre que M. Forester avait été forcé par quelques affaires à entreprendre un voyage dans le continent, et que Collins, dont la santé était déjà fort dérangée lorsque je l’avais rencontré, était en ce moment retenu par une maladie dangereuse. Son voyage aux Indes avait totalement ruiné sa consti-