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absurde de vous expliquer avec moi, vous choisirez un autre moment. »

Je ne pus rien ajouter. J’avais eu le cœur déchiré pendant tout ce dialogue. Je n’eus pas la force de prolonger la peine de cette respectable femme, à qui j’avais fait tant de mal, quoique innocent des crimes qu’elle m’imputait. J’obéis à ses ordres et m’éloignai.

Je retournai machinalement à ma demeure. En entrant dans la maison dont j’occupais un appartement, je trouvai tous mes hôtes sortis. La femme et les enfants avaient été prendre le frais ; le mari était dehors à ses occupations ordinaires. Dans ce pays on ne ferme les portes, pendant le jour, qu’au loquet. Ainsi j’ouvris moi-même, et j’entrai dans la cuisine. Comme mes yeux se portaient indifféremment, de côté et d’autre, ils tombèrent par hasard sur un papier posé dans un coin, qui, par je ne sais quelle liaison d’idées que je ne saurais expliquer, m’inspira de la curiosité et du soupçon. Je courus à l’endroit où il était, je m’en saisis, et je lus, quoi ? La merveilleuse et surprenante histoire de Caleb Williams, ce même écrit qui m’avait causé de si affreuses angoisses dans les derniers moments de mon séjour à Londres.

Cette découverte m’éclaircit tout d’un coup le mystère que je n’avais pu comprendre. Une affreuse certitude succéda aux doutes qui m’avaient tourmenté. L’effet de la foudre n’est ni plus rapide, ni plus terrible ; je restai anéanti.

Il n’y avait donc plus d’espérance pour moi ! Il