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de M. Spurrel. Il avait calculé avec lui-même combien de temps encore j’étais en état de travailler. Il se rappelait avec effroi la dépense que lui avaient occasionnée la maladie et la mort de son fils. Il était bien décidé à ne pas répéter les mêmes frais. Il craignait cependant la honte d’avoir des torts envers moi. Il avait peur de sa propre sensibilité : il sentait que je faisais des progrès dans son affection, et que bientôt il ne lui serait plus possible de m’abandonner. Par une sorte d’instinct secret, il fut conduit à éviter une action plus généreuse par la plus lâche de toutes, et ne put résister à l’appât de la récompense promise, joint au premier motif.


XXXVII


Après avoir donné carrière à tout mon ressentiment contre M. Spurrel, je le laissai immobile et hors d’état de répondre un mot. Gines et son camarade m’accompagnèrent. Il est inutile de dépeindre toute l’insolence de cet homme. Il était dominé alternativement par la joie triomphante d’avoir pu consommer enfin sa vengeance, et par le regret d’avoir laissé aller la récompense, disait-il, au vieux ladre de chez qui nous sortions, quoiqu’il jurât bien de la lui faire passer devant le nez, s’il le