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Vous êtes un homme plein de lumières et de pénétration. Trouvez-vous rien en moi qui décèle un coupable ? Rappelez-vous tout ce que vous avez pu y remarquer. Vous semblé-je avoir une âme capable de ce qu’on m’impute ? Un vrai criminel se montrerait-il aussi ferme, aussi calme, aussi inébranlable que je l’ai paru devant vous ?

» Mes camarades de service ! M. Falkland est un homme de naissance et de fortune ; il est votre maître. Moi, je suis un pauvre garçon de village ! sans un ami dans le monde. Ce sont des circonstances qui établissent entre nous deux, jusqu’à un certain point, une différence réelle ; mais ce ne sont pas des causes suffisantes pour renverser les principes de la justice. Ne perdez pas de vue les conséquences de la situation où je me trouve ; songez qu’une décision donnée contre moi dans une affaire où je proteste si solennellement devant vous de mon innocence, tend à me priver pour jamais de ma réputation et de mon repos, à conjurer contre moi la haine et le mépris du monde entier, et à décider peut-être irrévocablement de ma liberté et de ma vie. Si votre conscience, si vos yeux, si les faits que vous connaissez vous disent que je suis innocent, parlez pour moi. Ne souffrez pas qu’une timidité pusillanime vous empêche de sauver de l’abîme un de vos semblables, qui ne mérite pas d’avoir une seule créature humaine pour ennemi. Pourquoi la faculté de parler nous est-elle donnée, si ce n’est pour communiquer aux autres nos sentiments ? Je ne croirai jamais qu’un homme plein