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— C’est bien vrai, reprit un autre. J’étais à la ville aujourd’hui pour acheter des avoines pour mon maître ; les agents de la police étaient sur pied, et il y en avait qui croyaient l’avoir attrapé ; mais c’était une fausse alerte.

— C’est que c’est une bonne affaire que cent guinées, répliqua l’autre. Je ne serais pas fâché de les trouver dans mon chemin.

— Pour ce qui est de ça, reprit celui qui venait de la ville, cent guinées sont aussi bonnes pour moi que pour un autre ; néanmoins, je ne saurais dire comme vous. Il me semble que l’argent que j’aurais gagné à envoyer un chrétien à la potence ne me porterait jamais profit.

— Bah ! contes de ma grand’mère ! il faut bien qu’il y en ait quelques-uns de pendus, pour que les autres puissent rouler carrosse en paix. Et puis, je pardonnerais bien à ce drôle-là toutes ses voleries, si ce n’est qu’il a été assez coquin pour forcer à la fin la maison de son propre maître. C’est aussi trop mal.

— Seigneur Dieu ! seigneur Dieu ! reprit l’autre, je vois que vous ne savez seulement pas un mot de cette affaire-là. Je m’en vas vous dire ce qui en est, comme je l’ai appris à la ville. Je doute seulement qu’il ait jamais rien pris à son maître. Mais, écoutez. D’abord il faut que vous sachiez comment le squire Falkland a été autrefois jugé pour meurtre…

— Oui, oui, nous savons cela.

— Eh bien donc, il était innocent comme l’enfant qui vient de naître. Mais il paraît qu’il a la tête un