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fisant pour ralentir l’activité des recherches dirigées contre moi. Je soupirai donc pour cet état de solitude et d’obscurité, pour cet asile contre les persécutions du monde, et même contre sa simple attention, que mon imagination s’était créé avec tant de plaisir au moment où j’avais brisé mes chaînes.

Telles étaient les réflexions qui m’occupaient. À la fin, voulant me distraire de ce conflit de mon esprit, je tirai de ma poche un Horace qui m’avait été légué par mon cher Brighwell. Je lus avec avidité son épître au grammairien Fuscus, dans laquelle il lui fait une si belle description de la tranquillité et de l’indépendance délicieuse d’une vie champêtre. Le soleil vint alors à se lever derrière les collines qui bornaient ma vue à l’orient, et j’ouvris ma fenêtre pour jouir de ce spectacle. Le jour commençait avec un doux éclat, et il était paré de tous ces charmes que les poëtes de la nature, comme on les appelle, ont tant de plaisir à décrire. Dans cette scène magnifique, surtout après une contention d’esprit assez longue, il y avait quelque chose de ravissant qui m’entraînait au repos. Insensiblement une rêverie confuse s’empara de toutes mes facultés, je quittai ma fenêtre, je me jetai sur mon lit et m’endormis.

Je ne me rappelle pas précisément les images qui me passèrent dans l’esprit pendant ce sommeil ; mais je sais qu’elles se terminèrent par l’idée d’une personne, agent de M. Falkland, qui s’approchait de moi pour m’assassiner. Vraisemblablement cette vision m’avait été suggérée par le projet que je