cause de l’expulsion de Gines. Gines avait toujours été l’objet particulier de sa préférence ; et, dans le zèle dont elle était animée pour les intérêts de la société, elle trouvait qu’un novice à la place d’un pécheur endurci était un fort mauvais échange. Ajoutez à cela, que naturellement elle était morose et grondeuse ; or, les personnes de ce tempérament ne sauraient exister sans avoir sous la main quelque objet sur lequel elles déchargent leur bile. Elle ne perdait pas une seule occasion de montrer, jusque dans les plus petites choses, la haine qu’elle me portait ; à tout moment elle me lançait des regards de rage, qui m’auraient exterminé si elle en eût eu la force. On voyait combien elle était mortifiée de ne pouvoir contenter sa malice, et combien il lui en coûtait de n’avoir, pour exprimer sa terrible férocité, que la mauvaise humeur d’une pauvre servante. Quant à moi, qui avais été accoutumé à faire face à des adversaires plus formidables et à affronter d’autres périls, tout son dépit n’était pas capable de troubler ma tranquillité.
Quand je me sentis mieux, je mis mon protecteur au fait de mon histoire, excepté de ce qui avait rapport à la découverte du fatal secret de M. Falkland. C’était une chose que je ne pouvais pas prendre sur moi de dévoiler, même dans une situation telle que celle-ci, où il n’y avait pas, à ce qu’il semble, la moindre probabilité qu’on pût en faire usage contre mon persécuteur. Néanmoins, celui à qui je faisais cette ouverture, et dont la façon de penser était tout l’opposé de celle de M. Forester, ne prit pas ma