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d’aller avec mon père à la campagne pour quelques semaines et qu’elle ne se désespérât pas que Laverdure lui donnerait souvent de mes nouvelles.

Notez, cher marquis, que je n’avais pas voulu confier au président que son domestique se travestissait pour mon service. Cette remarque sera nécessaire par la suite.

Nous partîmes pour la terre de mon père. Rozette, cependant, lisait avec avidité les livres que je lui avais envoyés. Elle se préparait au rôle dont je lui avais indiqué l’idée dans ma dernière lettre. Elle n’eut que trop le temps de s’y exercer et de pleurer sur cette malheureuse invention. Mais n’anticipons point sur les faits.

La terre où j’accompagnai mon père, cher marquis, est en Picardie : l’air y est serein, le pays assez beau, et notre maison très bien disposée. Elle est un peu ancienne, mais elle ressemble à certaines femmes de la Cour qui ont perdu la fleur de leur jeunesse, mais qui sont cultivées parce qu’elles sont profitables en des rencontres. Pendant quelques jours, nous ne vîmes personne. Nous ne nous souciions pas de compagnie puisque mon père n’avait entrepris ce voyage que pour arranger ses affaires dans ce pays. Insensiblement, divers gentilshommes des environs nous honorèrent de tours visites : la politesse ne nous permit pas de demeurer en reste. Nous les avions trop bien traités, ils se piquèrent de nous rendre la pareille. Les Picards, en général, sont de bonnes gens francs pour l’ordinaire, estimables quand ils donnent du bon côté mais malins et fourbes plus que les Normands, quand ils quittent leurs inclinations natales.

Les différents endroits où nous fûmes reçus ne méritent pas que je vous en parle, Là, c’était un vieil officier qui