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et de Platon, affirmé, et en conséquence, que sans les troubles perpétuels des communes d’Italie, Pétrarque, Boccace, le Dante surtout, n’auraient jamais étonné le monde par la magnificence de leurs écrits. D’autres penseurs, tout au rebours, attribuent la grandeur du siècle de Périclès aux générosités de cet homme d’État, l’élan de la muse italienne à la protection des Médicis, l’ère classique de notre littérature et ses lauriers à l’influence bienfaisante du soleil de Louis XIV. On voit qu’en s’en prenant aux circonstances ambiantes, on trouve des avis pour tous les goûts, tels philosophes reportant à l’anarchie ce que tels autres donnent au despotisme.

Il est encore un avis : c’est celui qui voit dans la direction prise par les mœurs d’une époque la cause de la préférence des contemporains pour tel ou tel genre de travaux, qui mène, comme fatalement, les natures d’élite à se distinguer, soit dans la guerre, soit dans la littérature, soit dans les arts. Ce dernier sentiment serait le mien, s’il concluait ; malheureusement il reste en route, et lorsqu’on lui demande la cause génératrice de l’état des mœurs et des idées, il ne sait pas répondre qu’elle est tout entière dans l’équilibre des principes ethniques. C’est, en effet, nous l’avons vu jusqu’ici, la raison déterminante du degré et du mode d’activité d’une population.

Lorsque l’Asie était partagée en un certain nombre d’États délimités par des différences réelles de sang entre les nations qui les habitaient, il existait sur chaque point particulier, en Égypte, en Grèce, en Assyrie, au sein des territoires iraniens, un motif à une civilisation spéciale, à des développements d’idées propres, à la concentration des forces intellectuelles sur des sujets déterminés, et cela parce qu’il y avait originalité dans la combinaison des éléments ethniques de chaque peuple. Ce qui donnait surtout le caractère national, c’était le nombre limité de ces éléments, puis la proportion d’intensité qu’apportait chacun d’eux dans le mélange. Ainsi, un Égyptien du XXe siècle avant notre ère, formé, j’imagine, d’un tiers de sang arian, d’un tiers de sang chamite blanc et d’un tiers de nègre, ne ressemblait pas à un Égyptien du VIIIe, dans la nature duquel l’élément mélanien entrait pour une moitié, le