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comme en mal, la hauteur avait diminué par la double influence ariane des Iraniens et des Grecs. Avec ces derniers, elle prit de la modération dans les idées d’art, ce qui la conduisit à imiter les procédés et les formes helléniques ; mais d’un autre côté, et comme un cachet du goût sémitique raccourci, elle abonda dans l’amour des subtilités sophistiques, dans le raffinement du mysticisme, dans le bavardage prétentieux et les folles doctrines des philosophes. En cherchant le brillant, faux et vrai, elle eut de l’éclat, rencontra quelquefois la bonne veine, resta sans profondeur et montra peu de génie. Sa faculté principale, celle qui fait son mérite, c’est l’éclectisme ; elle ambitionna constamment le secret de concilier des éléments inconciliables, débris des sociétés dont la mort faisait sa vie. Elle eut l’amour de l’arbitrage. On reconnaît cette tendance dans les lettres, dans la philosophie, dans la morale, dans le gouvernement. La société hellénistique sacrifia tout à la passion de rapprocher et de fondre les idées, les intérêts les plus disparates, sentiment très honorable sans doute, indispensable dans un milieu de fusion, mais sans fécondité, et qui implique l’abdication un peu déshonorante de toute vocation et de toute croyance.

Le sort de ces sociétés de moyen terme, formées de décombres, est de se débattre dans les difficultés, d’épuiser leurs maigres forces, non pas à penser, elles n’ont pas d’idées propres ; non pas à avancer, elles n’ont pas de but ; mais à coudre et recoudre en soupirant des lambeaux bizarres et usés qui ne peuvent tenir ensemble. Le premier peuple un peu plus homogène qui leur met la main sur l’épaule, déchire sans peine le fragile et prétentieux tissu.

Le nouveau monde comprit l’espèce d’unité qui s’établissait. Il voulut que les choses fussent représentées par les mots. Dès lors, pour marquer le plus haut degré possible de perfection intellectuelle, on s’accoutuma à se servir du terme d’atticisme, idéal auquel les contemporains et compatriotes de Périclès auraient eu peine à prétendre. On plaça au-dessous le nom d’Hellène ; plus bas, on étagea des dérivés comme hellénisant, hellénistique, afin d’indiquer des mesures dans les degrés