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que les sanctuaires d’Asie. Ce blâme est injuste, ou du moins repose sur une confusion d’idées. Si l’on appelle spiritualisme l’ensemble des théories mystiques, on a raison ; mais si, avec plus de vérité, l’on considère que ces théories ne prennent leur source que dans des poussées d’imagination délivrées de raison et de logique, et n’obéissant plus qu’aux éperons de la sensation, on conviendra que le mysticisme n’est pas du spiritualisme, et qu’à ce titre on a mauvaise grâce à accuser les Grecs d’avoir donné dans les voies sensualistes en s’en écartant. Ils furent, au contraire, beaucoup plus exempts que les Asiatiques des principales misères du matérialisme, et, culte pour culte, celui du Jupiter d’Olympie est moins dégradant que celui de Baal. J’ai, du reste, déjà touché ce sujet.

Cependant les Grecs n’étaient pas non plus très spiritualistes. L’idée sémitique régnait chez eux, bien que réduite, et s’exprimait par la puissance des mystères sacrés, exercés dans les temples. Les populations acceptaient ces rites en se bornant quelquefois à les mitiger, suivant le sentiment d’horreur que la laideur physique inspirait. Quant à la laideur morale, nous savons qu’on était plus accommodant.

Cette rare perfection du sentiment artistique ne reposait que sur une pondération délicate de l’élément arian et sémitique avec une certaine portion de principes jaunes. Cet équilibre, sans cesse compromis par l’affluence des Asiatiques sur le territoire des colonies ioniennes et de la Grèce continentale, devait disparaître un jour pour faire place à un mouvement de déclin bien prononcé.

On peut calculer approximativement que l’activité artistique et littéraire des Grecs sémitisés naquit vers le VIIe siècle, au moment où fleurirent Archiloque, 718 ans avant J.-C., et les deux fondeurs en bronze Théodore et Rhœcus, 691 ans avant J.-C. La décadence commença après l’époque macédonienne, quand l’élément asiatique l’emporta décidément, autrement dit vers la fin du IVe siècle, ce qui donne un laps de quatre cents ans. Ces quatre cents années sont marquées par une croissance ininterrompue de l’élément asiatique. Le style de Théodore paraît avoir été, dans la Junon de Samos, une simple