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que le descendant clairsemé de bannis et de traînards. Son territoire représente une demeure abandonnée, trop vaste pour ceux qui l’occupent, et qui ne sauraient pas se dire absolument les héritiers directs et légitimes des maîtres primordiaux.

Les observateurs attentifs, qui tous, d’un commun accord, ont reconnu chez les naturels du nouveau monde les caractères frappants et tristes de la décomposition sociale, ont cru, pour la plupart, que cette agonie était celle d’une société jadis constituée, était celle de l’intelligence vieillie, de l’esprit usé. Point. C’est celle du sang frelaté, et encore n’ayant été primitivement formé que d’éléments infimes. L’impuissance de ces peuples était telle, à ce moment même où des civilisations nationales les éclairaient de tous leurs feux, qu’ils n’avaient pas même la connaissance du sol sur lequel ils vivaient. Les empires du Mexique et du Pérou, ces deux merveilles de leur génie, se touchaient presque, et on n’a jamais pu découvrir la moindre liaison de l’un à l’autre. Tout porte à croire qu’ils s’ignoraient. Cependant ils cherchaient à étendre leurs frontières, à se grossir de leur mieux. Mais les tribus qui séparaient leurs frontières étaient si mauvaises conductrices des impressions sociales qu’elles ne les propageaient pas même à la plus faible distance. Les deux sociétés constituaient donc deux îlots qui ne s’empruntaient et ne se prêtaient rien.

Cependant elles avaient longtemps été cultivées sur place, et avaient acquis toute la force qu’elles devaient jamais avoir Les Mexicains n’étaient pas les premiers civilisateurs de leur contrée. Avant eux, c’est-à-dire avant le Xe siècle de notre ère (1)[1], les Toltèques avaient fondé de grands établissements sur le même sol, et avant les Toltèques on reporté encore l’âge des Olmécas, qui seraient les véritables fondateurs de ces grands et imposants édifices dont les ruines dorment ensevelies au plus profond des forêts du Yucatan. D’énormes murailles formées de pierres immenses, des cours d’une


(1) Prescott (ouvr. cité, t. III, p. 255) ne fait même remonter qu’au Xe siècle l’arrivée des Toltèques.


  1. (1) Prescott (ouvr. cité, t. III, p. 255) ne fait même remonter qu’au Xe siècle l’arrivée des Toltèques.