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entretenus avec la Suisse et la Gaule méridionale étaient fort relâchés ; la Suisse était plus inclinée vers l’Allemagne rhénane, le sud de la Gaule vers les provinces moyennes. Et quel était le lien commun de ces rapprochements ? L’élément romain à coup sûr, mais, dans cet élément composite, plus particulièrement l’essence celtique qui reparaît de son côté. La preuve en est que, si la partie sémitisée avait agi en cette circonstance, la Suisse et le sud de la Gaule auraient resserré leurs anciens rapports avec l’Italie, au lieu de les rendre moins intimes.

L’Allemagne tout entière, agissant sous la même influence celtique, se chercha, et maria plus étroitement ses intérêts autrefois si sporadiques. L’élément romano-gallique, dans sa résurrection, trouvait peu de diflicultés à se combiner avec les principes slaves, en vertu de l’antique analogie. Les pays scandinaves devinrent plus attentifs pour un pays qui avait eu le temps de nouer avec eux des rapports ethniques non germains déjà suffisamment considérables. Au milieu de ce resserrement universel, les contrées rhénanes perdirent leur suprématie, et il devait nécessairement en être ainsi, puisque c’était la nature gallique qui désormais y avait le dessus.

Quelque chose de grossier et de commun, qui n’appartenait ni à l’élément germanique ni au sang hellénisé, s’infiltra partout. La littérature chevaleresque disparut des forteresses qui bordent le cours du Rhin ; elle fut remplacée par les compositions railleuses, bassement obscènes, lourdement grotesques de la bourgeoisie des villes. Les populations se complurent aux trivialités de Hans Sachs. C’est cette gaieté que nous appelons si justement la gaieté gauloise, et dont la France produisit, à cette même époque, le plus parfait spécimen, comme, en elTet, elle en avait le droit inné, en faisant naître les facéties de haulte graisse, compilées par Rabelais, le géant de la facétie.

Toute l’Allemagne se trouva capable de rivaliser de mérite avec les villes rhénanes dans la nouvelle phase de civilisation dont cette bonne humeur frondeuse fut l’enseigne. La Saxe, la Bavière, l’Autriche, le Brandebourg même, se virent portés à peu près sur un même plan, tandis que du côté du sud, et