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était assez grande pour s’imposer longtemps. C’était un pays voué pour toujours aux occupations étrangères, ou à une anarchie plus ou moins bien déguisée.

Dans le nord de la Péninsule, la domination des Lombards était incontestée. Ces Germains, peu assimilés à la population romanisée, ne partageaient pas son indifférence pour la suprématie d’une race germanique différente de la leur. Comme ils n’étaient pas fort nombreux, Charlemagne pouvait les vaincre : c’était tout, il ne pouvait pas étouffer leur nationalité (1)[1].

En Espagne, le sud entier et le centre n’appartenaient plus à l’empire, l’invasion musulmane en avait fait une annexe des vastes États du khalife. Quant au nord-ouest, où les descendants des Suèves et des Visigoths s’étaient cantonnés, il présentait dans les masses inférieures beaucoup plus d’éléments celtibères que de romains. De là une empreinte spéciale qui distinguait ces peuples des habitants de la France méridionale comme des Maures, bien qu’un peu moins.

Le sang de l’Aquitaine, pourvu de quelque affinité avec celui des Navarrais et des hommes de la Galice par ses éléments originairement indigènes, avait en outre une alluvion romaine fort riche, et une alluvion barbare de quelque épaisseur, sans équivaloir à celle de l’Espagne septentrionale.

En Provence et dans le Languedoc, la couche romaine était tellement considérable, le fond celtique sur lequel elle avait été établie était si fort primé par elle, que l’on aurait pu se croire là dans l’Italie centrale, d’autant mieux que les invasions sarrasines y entretenaient une infiltration sémitique qui n’était pas sans puissance (2)[2]. Les Visigoths, après un séjour où leur sang s’était beaucoup oblitéré, étaient en partie retirés en Espagne, en partie en voie de s’absorber définitivement dans la population native. Vers l’est, des groupes burgondes, et partout

(1) Savigny observe, avec vérité, que le nombre des groupes pourvus du droit personnel est beaucoup plus considérable en Italie qu’on France au VIIe siècle. Il en conclut judicieusement que les différentes races y sont complètement représentées. (Ouvr. cité, t. 1, p. 104.)

(2) Reynaud, Invasions des Sarrasins en France, en Savoie et dans la Suisse, Paris, 1836, in-8o.


  1. (1) Savigny observe, avec vérité, que le nombre des groupes pourvus du droit personnel est beaucoup plus considérable en Italie qu’on France au VIIe siècle. Il en conclut judicieusement que les différentes races y sont complètement représentées. (Ouvr. cité, t. 1, p. 104.)
  2. (2) Reynaud, Invasions des Sarrasins en France, en Savoie et dans la Suisse, Paris, 1836, in-8o.