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les autres dans la romanité (1)[1]. Elle anime les légions, possède les hautes charges militaires, décide dans les conseils souverains. La race gauloise, qui d’ailleurs n’était représentée vis-à-vis d’elle que par des groupes septentrionaux, ceux qui lui étaient déjà apparentés, lui cède absolument le pas. L’esprit des jarls, chefs de guerre, s’empare du gouvernement pratique, et l’on est déjà en droit de dire que Rome est germanisée, puisque le principe sémitique tombe au fond de l’océan social et se laisse visibleifient remplacer à la surface par la nouvelle couche ariane.

Une révolution si extraordinaire, bien que latente, cette superposition contre nature d’une race ennemie, qui, plus souvent vaincue que victorieuse, et méprisée officiellement comme barbare, venait ainsi déprimer les races nationales, une si étrange anomalie avait beau s’effectuer par la force des choses, elle avait à percer trop de difficultés pour ne pas s’accompagner d’immenses violences.

Les Germains, appelés à diriger l’empire, trouvaient en lui un corps épuisé et moribond. Pour le faire vivre, ce grand corps, ils étaient incessamment obligés de combattre ou les demandes d’un tempérament différent du leur, ou les caprices nés du malaise général, ou les exaspérations de la fièvre, également fatales au maintien de la paix publique. De là des sévérités d’autant plus outrées que ceux qui les jugeaient nécessaires, étant imparfaitement éclairés sur la nature complexe de la société qu’ils traitaient, poussaient aisément jusqu’à l’abus l’emploi des méthodes réactives. Ils exagéraient, avec toute la fougue intolérante de la jeunesse, la proscription dans l’ordre politique et la persécution dans l’ordre religieux. C’est ainsi qu’ils se montrèrent les plus ardents ennemis du christianisme. Eux qui devaient plus tard devenir les propagateurs de tous ses triomphes, ils débutèrent par le méconnaître  ; ils se laissèrent prendre à la calomnie qui le poursuivait. Persuadés qu’ils tenaient dans ce culte nouveau une des expressions les


(1) « La Pannonie et la Mœsie romaines... furent, aux IIIe et IVe siècles, la pépinière des légions, et, par les légions, celle des Césars. » Amédée Thierry, Revue des Deux-Mondes, 15 juillet 1854.)


  1. (1) « La Pannonie et la Mœsie romaines... furent, aux IIIe et IVe siècles, la pépinière des légions, et, par les légions, celle des Césars. » Amédée Thierry, Revue des Deux-Mondes, 15 juillet 1854.)