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Cette condition était indispensable, et voici pourquoi : les Celtes de la Gaule, animés d’un esprit de localité bien franc, et plein de turbulence, s’attachaient beaucoup plus, dans les affaires de leurs cités, aux questions de personnes qu’aux questions de fait. La politique de leurs nations avait pris, dans cette habitude, une vivacité d’allures qui n’était guère proportionnée à la dimension des territoires. Des révolutions perpétuelles avaient épuisé la plupart de ces peuples. La théocratie, renversée presque partout, d’abord effacée devant la noblesse, puis, au moment où les Romains dépassaient les limites de la Provence, la démocratie et son inséparable sœur, la démagogie, faisant invasion à leur tour, avaient attaqué le pouvoir des nobles. La présence de ce genre d’idées annonçait clairement que le mélange des races était arrivé à ce point où la confusion ethnique crée la confusion intellectuelle et l’impossibilité absolue de s’entendre. Bref, les Gaulois, qui n’étaient point des barbares, étaient des gens en pleine voie de décadence, et, si leurs beaux temps avaient infiniment moins d’éclat que les périodes de gloire à Sidon et à Tyr, il n’en est pas moins indubitable que les cités obscures des Carnutes, des Rèmes et des Éduens mouraient du même mal qui avait terminé l’existence des brillantes métropoles chananéennes (1)[1].

Les populations galliques, mêlées de quelques groupes slaves, s’étaient diversement alliées aux aborigènes finnois. De là des différences fondamentales. Il en était résulté les séparations primitives les plus tranchées des tribus et des dialectes. Dans le nord, quelques peuples avaient été relevés par le contact avec les Germains ; d’autres, dans le sud-ouest, avaient subi celui des Aquitains ; sur la côte de la Méditerranée, le mélange s’était opéré avec des Ligures et des Grecs, et depuis un siècle les Germains sémitisés occupant la Province étaient venus compliquer encore ce désordre. Le développement du mal était d’ailleurs favorisé par la disposition sporadique de

(1) Tacite, si grand admirateur des Germains, bien que souvent d’une manière un peu romanesque, traite les Gaulois de son temps avec une extrême sévérité. {Germ., 28, 29.)


  1. (1) Tacite, si grand admirateur des Germains, bien que souvent d’une manière un peu romanesque, traite les Gaulois de son temps avec une extrême sévérité. {Germ., 28, 29.)