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détruit, tout devait être changé. Les mots même allaient perdre leur sens. La liberté, l’autorité, la loi, la patrie, la monarchie, la religion même, se dépouillant peu à peu de costumes et d’insignes usés, allaient pour plusieurs siècles en posséder d’autres, bien autrement sacrés.

Cependant les nations germaniques, procédant avec la lenteur qui est la condition première de toute œuvre solide, ne devaient pas débuter par cette restauration radicale ; elles commencèrent par vouloir maintenir et conserver, et cette tâche honorable, elles l’accomplirent sur la plus vaste échelle.

Pour assister à la manière dont elle s’exécuta, reportons-nous encore une fois à l’époque du premier César, et nous allons voir se dérouler sous nos yeux cet état de choses qu’annonçait la fin du livre précédent : nous allons contempler la Rome germanique.


CHAPITRE IV.

Rome germanique. — Les armées romano-celtiques et romano-
germaniques. — Les empereurs germains.

Le rôle ethnique des populations septentrionales ne commence qu’au Ier siècle avant notre ère à prendre une importance générale et bien marquée.

Ce fut l’époque où le dictateur crut devoir traiter d’une manière si favorable les Gaulois, ces antiques ennemis du nom romain. Il fit d’eux les soutiens directs de son gouvernement, et ses successeurs, continuant dans la même voie, témoignèrent de leur mieux qu’ils avaient bien compris tous les services que les nations habitant entre les Pyrénées et le Rhin pouvaient rendre à un pouvoir essentiellement militaire. Ils s’étaient aperçus que c’était chez celles-ci une sorte d’instinct que de se dévouer sans réserve aux intérêts d’un général, quand surtout il était étranger à leur sang.