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tous les étrangers, fussent-ils de son peuple, sous un jour à peu près égal, et la supériorité qu’il s’arroge mise à part, une certaine partialité pour ses congénères également exceptée, il est assez libre de préjugés natifs contre ceux qui l’abordent, de quelque contrée éloignée qu’ils puissent venir ; de telle sorte que, s’il leur est donné de faire éclater à ses yeux des mérites réels, il ne refusera pas d’en reconnaître les bienfaits. De là vient que, dans la pratique, il accorda de très bonne heure aux Kymris et aux Slaves qui l’entouraient une estime proportionnée à ce qu’ils pouvaient lui montrer de vertus guerrières ou de talents domestiques. Dès les premiers jours de ses conquêtes, l’Arian mena à la guerre les serviteurs de son odel, et encore plus volontiers les hommes de son féod. Tandis qu’il était, lui, le compagnon gagé du chef de guerre, cette suite de rang inférieur combattait sous sa conduite et prenait part à tous ses profits. Il lui permit de recueillir de l’honneur, et reconnut cet honneur noblement quand il fut bien acquis ; il avoua l’illustration là où elle se trouva ; il fit mieux : il laissa son vaincu devenir riche, et l’achemina ainsi, pour toutes ces causes, à un résultat qui ne pouvait manquer d’arriver et qui arriva, que ce vaincu devint avec le temps son égal. Dès avant les invasions du V* siècle, ces grands principes et toutes leurs conséquences avaient agi et porté leurs fruits (1)[1]. On va en voir la démonstration.

Les nations germaniques ne s’étaient, dans l’origine, composées que de Roxolans, que d’Arians  ; mais au temps où elles habitaient encore, à peu près compactes, la péninsule Scandinave, la guerre avait déjà réuni dans les odels trois classes de personnes : les Arians proprement dits, ou les jarls : c’étaient les maîtres (2)[2] ; les karls, agriculteurs, paysans domiciliés, tenanciers du jarl, hommes de famille blanche métisse, Slaves,


(1) Voir tome Ier. — Je renvoie à ce passage, où j’ai indiqué la double loi d’attraction et de répulsion qui préside aux mélanges ethniques, et qui est, dans sa première partie, tout à la fois l’indice de l’aptitude à la civilisation chez une race et l’agent de sa décadence.

(2) Rigsmal, st. 23-31.


  1. (1) Voir tome Ier. — Je renvoie à ce passage, où j’ai indiqué la double loi d’attraction et de répulsion qui préside aux mélanges ethniques, et qui est, dans sa première partie, tout à la fois l’indice de l’aptitude à la civilisation chez une race et l’agent de sa décadence.
  2. (2) Rigsmal, st. 23-31.