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confirmés, et prêchaient des doctrines qui menaient là, ou pas loin. Quelques-uns, doués d’une éloquence hors ligne, parvenaient à plaire aux grands personnages, et, vivant à leurs frais, agissaient sur leurs résolutions ou sur leur conscience. Beaucoup, après avoir professé qu’il n’y avait pas de Dieu, ne trouvant pas leur métier assez lucratif, se faisaient isiaques, ou prêtres de Mithra, ou desservants d’autres divinités asiatiques découvertes par eux et qu’ils avaient l’air d’inventer. C’était le goût dominant dans les hautes classes que d’aller jeter à la tête d’idoles, inconnues la veille, des flots d’adoration superstitieuse qui ne savaient plus où se répandre, depuis que les cultes réguliers n’étaient pas moins discrédités par la mode que les autres traditions nationales. Tous ces philosophes, tous ces savants, tous ces rhéteurs sémitisés étaient le plus souvent gens d’esprit. Ils tenaient généralement dans un coin de leur cervelle un système propre à régénérer le corps social ; mais, par un malheur fâcheux et qui paralysait tout, autant de têtes, autant d’avis, de sorte que les multitudes dont ils rêvaient de régler la vie intellectuelle se plongeaient de plus en plus, avec eux, dans un chaos inextricable.

Puis, effet naturel de l’abaissement des puissances ethniques et de l’énervement des races fortes, les aptitudes littéraires et artistiques avaient été chaque jour déclinant. Ce qu’on était contraint, par pauvreté, de considérer comme mérite, devenait très misérable. Les poètes ressassaient ce qu’avaient dit et redit les anciens. Bientôt le suprême talent se borna à copier d’aussi près que possible la forme de tel ou tel classique. On en arriva à s’extasier sur les centons. Le métier poétique en devint plus difficile. La palme appartenait à qui savait composer le plus de vers possible avec des hémistiches pris à Virgile ou à Lucain. De théâtres, depuis longtemps, plus l’ombre. Les mimes jadis avaient détrôné la comédie ; les acrobates, les gladiateurs, les coqs et les courses de chars avaient fait taire les mimes.



piscator, eam imposuerit hamis escam, quam scierit appetituros esse pisciculos, sine spe prædæ moratur in scopulo. »