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Ainsi la société grecque, très neuve encore, se hiérarchisait suivant la supériorité de naissance. À côté de la liberté et de la liberté jalouse des Arians Hellènes, pas l’ombre d’égalité entre les autres occupants du sol et ces maîtres audacieux. Le sceptre, bien que donné en principe à l’élection, trouva, par le respect dont on entourait les grands lignages, une forte cause de se perpétuer exclusivement dans quelques descendances. Sous certains rapports même, l’idée de suprématie d’espèce, consacrée par celle de famille, conduisit les Arians Grecs à des résultats comparables à ceux que nous avons observés en Égypte et dans l’Inde, c’est-à-dire que, eux aussi, ils connurent les démarcations de castes et les lois prohibitives des mélanges. Il y a plus : ils appliquèrent ces lois jusqu’aux derniers temps de leur existence politique. On cite des maisons sacerdotales qui ne s’alliaient qu’entre elles, et la loi civile fut toujours dure pour les rejetons des citoyens mariés à des étrangères. Cependant, je me hâte de le dire, ces restrictions étaient faibles. Elles ne pouvaient avoir la même portée que les lois du Nil et de l’Arya-varta. La race ariane-grecque, malgré la conscience de sa supériorité d’essence et de facultés sur les populations sémitiques qui la pénétraient de toutes parts, avait ce désavantage d’être jeune d’expérience et de savoir, tandis que les autres étaient vieilles de civilisation. Ces dernières jouissaient, à son détriment, d’une supériorité extérieure qui ne permettait pas de les dédaigner et de se refuser complètement à l’alliage. Le système des castes resta toujours à l’état d’embryon : il ne put se développer. L’hellénisme eut trop souvent intérêt à permettre les mésalliances, et d’autres fois il se vit forcé de les subir. Sous ce double rapport, sa situation ressembla beaucoup à ce que fut plus tard celle des Germains.

Quoi qu’il en soit, l’idée nobiliaire se montra extrêmement forte et puissante chez les Arians Grecs. Le classement des citoyens ne se faisait que d’après la valeur de chaque descendance ; les vertus individuelles venaient après (1)[1]. Je le répète



(1) Il faut que cette doctrine ait été bien solidement attachée à l’esprit des tribus helléniques, par la partie ariane de leur sang, puisque, dans la période démocratique et à Athènes même, la naissance conservera

  1. (1) Il faut que cette doctrine ait été bien solidement attachée à l’esprit des tribus helléniques, par la partie ariane de leur sang, puisque, dans la période démocratique et à Athènes même, la naissance conservera toujours du prix. M. Mc. Cullagh le reconnaît sans difficulté : « Regard for ancient lineage was, through every change of plight and policy, fast rooted in the Ionic mind. The old families remained every where, and even in the most democratic states, preserved certain political privileges and what they doubtless prized still more, certain social distinction. » (T. I, p. 239.)