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commune, ne pouvait avoir et n’eut pas d’hérédité monarchique, et ce fut plutôt même le hasard qu’une conséquence des principes ethniques qui, en mettant pour le début le commandement dans la famille des Jules et les maisons ses parentes, conféra à une sorte de dynastie trop imparfaite, mais issue de la Ville, les premiers honneurs du pouvoir absolu. Ce fut hasard, car rien n’empêchait, dans les dernières années de la république, qu’un maître d’extraction italiote, ou asiatique, ou africaine, fît valoir avec succès les droits du génie (1)[1]. Aussi, ni le conquérant des Gaules, ni Auguste, ni Tibère, ni aucun des Césars, ne songea-t-il un instant au rôle de monarque héréditaire. Vaste comme était l’empire, on n’aurait pas reconnu à dix lieues de Rome, on n’aurait ni admis ni compris l’illustration d’une race sabine, et bien moins encore les droits universels que ses partisans eussent prétendu en faire découler. En Asie, au contraire, on connaissait encore les vieilles souches macédoniennes, et on ne leur contestait ni la gloire supérieure, ni les prérogatives dominatrices.

Le principat ne fut pas une dignité fondée sur les prestiges du passé, mais, au contraire, sur toutes les nécessités matérielles du présent. Le consulat lui apporta son contingent de forces ; la puissance tribunitienne y adjoignit ses droits énormes ; la préture, la questure, le censorat, les différentes fonctions républicaines vinrent tour à tour se fondre dans cette masse d’attributions aussi hétérogènes que les masses de peuples



(1) La population noble italiote commença à disparaître de Rome vers la seconde guerre punique. En 220 av. J.-C., deux ans avant l’ouverture des hostilités, le cens avait donné 270,213 citoyens romains. En 204, il n’y en avait plus que 214,000 ; cependant 8,000 esclaves avaient été affranchis pour pouvoir être incorporés dans les légions. (Zumpt, ouvr. cité, p. 13.) Après la guerre, il se trouva que huit légions avaient été anéanties à Cannes, et deux autres, avec les alliés italiotes, si bien massacrées dans la forêt Litana qu’il n’en avait échappé que dix hommes. On combla ces vides terribles au moyen d’étrangers, et les familles plébéiennes d’ancienne extraction passèrent au sénat et dans l’ordre équestre. (Ibidem, p. 25.) On voit à quel point les vieilles maisons d’origine sabine devaient être devenues rares parmi les patriciens au temps des premiers Césars.

  1. (1) La population noble italiote commença à disparaître de Rome vers la seconde guerre punique. En 220 av. J.-C., deux ans avant l’ouverture des hostilités, le cens avait donné 270,213 citoyens romains. En 204, il n’y en avait plus que 214,000 ; cependant 8,000 esclaves avaient été affranchis pour pouvoir être incorporés dans les légions. (Zumpt, ouvr. cité, p. 13.) Après la guerre, il se trouva que huit légions avaient été anéanties à Cannes, et deux autres, avec les alliés italiotes, si bien massacrées dans la forêt Litana qu’il n’en avait échappé que dix hommes. On combla ces vides terribles au moyen d’étrangers, et les familles plébéiennes d’ancienne extraction passèrent au sénat et dans l’ordre équestre. (Ibidem, p. 25.) On voit à quel point les vieilles maisons d’origine sabine devaient être devenues rares parmi les patriciens au temps des premiers Césars.