Page:Gobineau Essai inegalite races 1884 Vol 2.djvu/266

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

l’Italie dans la voie littéraire, par cette raison que le voisinage de l’Afrique, en renouvelant incessamment la partie mélanienne de son essence, le poussa vigoureusement dans cette voie. Rien donc de surprenant à ce que l’Espagne du sud fût un pays supérieur à la Province, et maintînt sa préséance aussi longtemps que la civilisation sémitisée eut la haute main dans le monde occidental.

Mais, de ce que la Gaule romaine se sémitisait, le sang celtique, loin de servir à rectifier ce que l’essence féminine asiatique apportait d’excessif dans la péninsule italique, était obligé, au contraire, de fuir devant sa puissance, et cette fuite-là ne devait jamais finir (1)[1].

César donc, ayant pour point d’appui la Province, complètement romanisée (2)[2], entreprit et conduisit à bien la conquête des Gaules supérieures. Lui et ses successeurs continuèrent à tenir les Celtes sous les pieds de la civilisation du sud. Toutes



(1) À cette époque, il ne faut plus guère parler de nations celtiques indépendantes au delà du Rhin. Par conséquent, la race des Kymris n’occupait plus, avec sa liberté plus ou moins complète, que la Gaule au-dessus de la Province, l’Helvétie et les îles Britanniques. Toutes ces contrées étaient certainement fort peuplées, mais elles ne pouvaient entrer en comparaison sous ce rapport avec l’empire. Rome seule comptait pour le moins deux millions d’habitants. Alexandrie en avait 600,000 (58 avant J.-C.). Jérusalem, pendant le siège de Titus, perdit 1,100,000 personnes, et 97,000 ayant été réduites en esclavage par les Romains, cette multitude, qui représentait d’ailleurs à peu près la population de toute la Judée, doit être considérée comme ayant formé, avant la guerre, 1,200,000 à 1,300,000 âmes pour cette très petite province. L’empire, sous les Antonins, comptait 160 millions d’âmes, et Gibbon, pour la même époque, n’en attribue que 107 à l’Europe entière. Il n’y avait donc aucune proportion entre la résistance que pouvaient offrir les nations galliques et l’énergie numérique dont Rome disposait contre elles. — Voir Zumpt, dans les Mémoires de l’Académie des sciences de Berlin, 1840, p. 20.

(2) On inventa, sous les empereurs, un mot spécial pour exprimer l’ensemble hétérogène de l’univers romain : ce fut celui de romanité, romanitas ; on l’opposait à la barbaria, qui comprenait toutes les nations, soit du sud, soit du nord, soit de l’Asie, soit de l’Europe, les Parthes comme les Germains, vivant en dehors de cette confusion. — Voir Améd. Thierry, Hist. de la Gaule sous l’administrat. rom. Introd., t. I, p. 199.


  1. (1) À cette époque, il ne faut plus guère parler de nations celtiques indépendantes au delà du Rhin. Par conséquent, la race des Kymris n’occupait plus, avec sa liberté plus ou moins complète, que la Gaule au-dessus de la Province, l’Helvétie et les îles Britanniques. Toutes ces contrées étaient certainement fort peuplées, mais elles ne pouvaient entrer en comparaison sous ce rapport avec l’empire. Rome seule comptait pour le moins deux millions d’habitants. Alexandrie en avait 600,000 (58 avant J.-C.). Jérusalem, pendant le siège de Titus, perdit 1,100,000 personnes, et 97,000 ayant été réduites en esclavage par les Romains, cette multitude, qui représentait d’ailleurs à peu près la population de toute la Judée, doit être considérée comme ayant formé, avant la guerre, 1,200,000 à 1,300,000 âmes pour cette très petite province. L’empire, sous les Antonins, comptait 160 millions d’âmes, et Gibbon, pour la même époque, n’en attribue que 107 à l’Europe entière. Il n’y avait donc aucune proportion entre la résistance que pouvaient offrir les nations galliques et l’énergie numérique dont Rome disposait contre elles. — Voir Zumpt, dans les Mémoires de l’Académie des sciences de Berlin, 1840, p. 20.
  2. (2) On inventa, sous les empereurs, un mot spécial pour exprimer l’ensemble hétérogène de l’univers romain : ce fut celui de romanité, romanitas ; on l’opposait à la barbaria, qui comprenait toutes les nations, soit du sud, soit du nord, soit de l’Asie, soit de l’Europe, les Parthes comme les Germains, vivant en dehors de cette confusion. — Voir Améd. Thierry, Hist. de la Gaule sous l’administrat. rom. Introd., t. I, p. 199.