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le sentiment, voilà l’opinion des héros d’Homère : voilà qui ne se retrouve qu’à l’origine des sociétés arianes.

À l’aurore des âges héroïques, et même longtemps après, les États grecs sont gouvernés d’après les données, les notions déjà observées dans l’Inde, en Perse, et quelque peu à l’origine de la société chinoise, c’est-à-dire pourvus d’un gouvernement monarchique, limité par l’autorité des chefs de famille, par la puissance des traditions et la prescription religieuse. On y remarque un grand éparpillement national, de fortes traces de cette hiérarchie féodale si naturelle aux Arians, préservatif assez efficace contre les inconvénients principaux du fractionnement, conséquence de l’esprit d’indépendance (1)[1]. Rien de plus surveillé dans l’exercice de son pouvoir qu’Agamemnon, le roi des rois ; rien de plus limité dans sa puissance que l’habile souverain d’Ithaque. L’opinion est maîtresse dans ces grands villages (2)[2], où il n’existe pas, sans doute, de journaux (3)[3], mais où les ambitieux, plus ou moins éloquents, ne manquent pas à la perturbation des affaires. Pour bien comprendre ce que c’était qu’un roi grec aux prises avec les difficultés gouvernementales, il n’est rien de mieux que d’étudier le coup d’État d’Ulysse contre les amants de Pénélope. On y



(1) « Between the different degrees of hellenic chivalry a certain equality at all times prevailed, which the fewness of their numbers comprend with the population amidst whom they dwelt and the hereditary pride of a dominant race, alike tended to preserve. We find the doric nobles, too, in after times, assuming to themselves the epithet of the Equals. » C’est un sentiment tout à fait pareil et d’une origine ethnique rigoureusement semblable, qui a rendu si cher à la noblesse du moyen âge le nom de pairs, traduction exacte du grec ῞Ομοιοι. (W. Torrens Mc. Cullagh, The industrial History of free Nations (London, 1846, in-8o, t. I, p. 3.)

(2) Athènes avait commencé par être une agrégation de plusieurs hameaux. Sparte était un composé de cinq bourgades et ne fut jamais une ville ; Mantinée également ; Tégée en comptait huit ; Dymé, en Achaïe, et Élis de même ; de même encore Mégare et Tanagra. Jusqu’à la bataille de Leuctres, la plupart des Arcadiens n’eurent aussi que des villages, et les Épirotes les imitèrent. (Grote, t. II, p. 346.)

(3) Les poètes, comme Hésiode et Homère, paraissent avoir eu leur franc parler contre les excès et probablement le simple usage aussi du pouvoir. (Hésiode, les Travaux et les jours, p. 186.)


  1. (1) « Between the different degrees of hellenic chivalry a certain equality at all times prevailed, which the fewness of their numbers comprend with the population amidst whom they dwelt and the hereditary pride of a dominant race, alike tended to preserve. We find the doric nobles, too, in after times, assuming to themselves the epithet of the Equals. » C’est un sentiment tout à fait pareil et d’une origine ethnique rigoureusement semblable, qui a rendu si cher à la noblesse du moyen âge le nom de pairs, traduction exacte du grec ῞Ομοιοι. (W. Torrens Mc. Cullagh, The industrial History of free Nations (London, 1846, in-8o, t. I, p. 3.)
  2. (2) Athènes avait commencé par être une agrégation de plusieurs hameaux. Sparte était un composé de cinq bourgades et ne fut jamais une ville ; Mantinée également ; Tégée en comptait huit ; Dymé, en Achaïe, et Élis de même ; de même encore Mégare et Tanagra. Jusqu’à la bataille de Leuctres, la plupart des Arcadiens n’eurent aussi que des villages, et les Épirotes les imitèrent. (Grote, t. II, p. 346.)
  3. (3) Les poètes, comme Hésiode et Homère, paraissent avoir eu leur franc parler contre les excès et probablement le simple usage aussi du pouvoir. (Hésiode, les Travaux et les jours, p. 186.)