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pu créer à un même degré, et, sous l’atteinte de ce colosse en pourriture, la débile caducité égyptienne s’était réduite en poussière et mêlée à lui. Existait-il dans le monde une troisième civilisation pour prendre la place des champions anciens ? Nullement : la Grèce ne représentait pas, vis-à-vis de l’Assyrie, une culture originale comme l’égyptienne, et bien que son intelligence eût des nuances très spéciales, la plupart des éléments qui la composaient se retrouvaient, avec le même sens et la même valeur, chez les peuples sémitiques du littoral méditerranéen. C’est une vérité qui n’a pas besoin de démonstration.

Dans leur opinion même, les Grecs faisaient beaucoup plus de cas de ce qu’ils appelaient, sans doute, en leur langage, les conquêtes de la civilisation, c’est-à-dire les importations de dieux, de dogmes, de rites asiatiques, et de rêveries monstrueuses venues des côtes voisines, que de la simplicité ariane professée jadis par leurs religieux ancêtres mâles. Ils s’enquéraient avec prédilection de ce qui s’était pensé et fait en Asie. Ils se mêlaient de leur mieux aux affaires, aux intérêts, aux querelles du grand continent, et, bien que pénétrés de leur propre importance, comme tout petit peuple doit l’être, bien qu’appelant même l’univers entier barbare, en dehors d’eux, leur regard ne se détachait pas de l’Asie.

Tant que les Assyriens furent indépendants, les Grecs, faibles et éloignés, ne comptèrent que peu dans le monde ; mais, comme le développement hellénique se trouva contemporain de la grande fortune des Arians Iraniens, ce fut à cette époque qu’en face des maîtres de l’Asie antérieure, ils eurent à opter entre l’antagonisme et la soumission. Le choix était indiqué par leur faiblesse. Ils acceptèrent l’influence victorieuse, dominatrice, irrésistible, du grand roi, et vécurent dans la sphère de sa puissance, sinon à l’état de sujets, du moins à celui de protégés.

Tout, je le répète, leur en faisait une obligation. La parenté avec les Asiatiques était étroite ; la civilisation presque identique dans ses bases, et, enfin, sans le bon vouloir des Perses, c’en était fait des colonies ioniennes, toujours et traditionnellement