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les rêves des classes moyennes d’Étrurie avaient cru déposer le germe dans le système de Servius Tullius ? J’ai laissé entrevoir qu’il n’en fut rien, et, en effet, il n’en pouvait rien être.

Une fois les Tyrrhéniens chassés, la population se trouva composée en grande majorité de Sabins, gens rudes, austères, belliqueux, et qui, très susceptibles de se développer dans le sens matériel, très capables de résistance contre les agressions, très aptes à imposer leurs notions par la force, n’étaient pas disposés à céder du premier coup leurs droits de suprématie aux Sicules plus spirituels, mais moins vigoureux, aux Rasènes descendants des soldats de Mastarna, bref, au chaos de tant de races qui avaient des représentants dans les rues de Rome (1)[1]. De sorte qu’après s’être débarrassés de la partie étrusque de la nation, les libéraux se trouvèrent avoir sur les bras la partie sabine, et celle-ci fut assez forte pour attirer à elle tout le pouvoir.

Suivant l’esprit des blancs, l’amour et le culte de la famille étaient très forts chez les Sabins, et, pour être mal vêtus, mal nourris et assez ignorants, les nobles de cette descendance n’étaient pas moins aristocratiquement inspirés que les lucumons les plus orgueilleux. Les Valériens, les Fabiens, les Claudiens, tous de race sabine, ne souffrirent pas que d’autres que leurs égaux partageassent avec eux les soins du gouvernement, et la seule satisfaction qu’ils laissèrent aux plébéiens fut d’abolir cette royauté qu’eux-mêmes auraient difficilement soufferte. Du reste, ils s’ingénièrent à imiter de leur mieux les maîtres dépossédés en concentrant sous leurs mains jalouses toutes les prérogatives sociales (2)[2].

Ils n’étaient pourtant pas dans cette position de supériorité complète où les Tyrrhéniens, Pélasges sémitisés, s’étaient trouvés vis-à-vis des Rasènes, de sorte que les plébéiens ne reconnurent pas très explicitement la légitimité de leur puissance, et n’en supportèrent le joug qu’en murmurant. L’embarras ne se bornait pas là : eux-mêmes, pour peu qu’ils fussent illustres



(1) O. Muller, ouvr. cité, p. 204.

(2) Id., ibid., p. 204.

  1. (1) O. Muller, ouvr. cité, p. 204.
  2. (2) Id., ibid., p. 204.