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Je suis loin toutefois de traiter avec indifférence ce que j’appelle ici question de forme, et, de même que je ne prendrai jamais pour type de l’homme social l’industriel consommé, ou le marchand le plus habile dans sa partie, et que je mettrai toujours au-dessus d’eux, mais certes à une hauteur incomparable, soit le prêtre, soit le guerrier, l’artiste, l’administrateur, ou ce qu’on appelle aujourd’hui l’homme du monde, et qu’on nommait au temps de Louis XIV l’honnête homme  ; comme, de même, je préférerai toujours, dans l’ordre des hommes d’élite, saint Bernard à Papin ou à Watt, Bossuet à Jacques Cœur, Louvois, Turenne, l’Arioste ou Corneille à toutes les illustrations financières, je n’appelle pas civilisation active, civilisation de premier ordre, celle qui se contente de végéter obscurément, ne donnant à ses sectateurs que des satisfactions en définitive fort incomplètes et par trop humbles, confinant leurs désirs sous une sphère bornée, et tournant dans cette spirale de perfectionnements limités dont la Chine a atteint le sommet. Or, tant qu’un groupe de peuples est réduit, pour tout mélange, à l’élément jaune combiné avec le blanc, il n’acquiert dans les qualités, les capacités, les aptitudes, soit mixtes, soit nouvelles, que cet hymen procrée, rien qui l’attire dans le courant nécessaire de l’élément féminin, et lui fasse rechercher la divination de ce qu’il y a de transcendantalement utile à cultiver les jouissances que l’imagination pure répand sur une société.

Si donc les peuples occidentaux avaient dû rester bornés à la combinaison de leurs premiers principes ethniques, il est plus que probable qu’à force d’efforts ils auraient fini par arriver à un état comparable à celui du Céleste Empire, sans cependant trouver le même calme. Il y avait déjà trop d’affluents divers dans leur essence, et surtout trop d’apports blancs. Pour cette raison, le despotisme raisonné du Fils du Ciel ne se serait jamais établi. Les passions militaires auraient, à chaque instant, bouleversé cette société vouée ainsi à une culture médiocre et à de longs et inutiles conflits.

Mais les invasions du Sud vinrent apporter aux nations européennes ce qui leur manquait. Sans détruire encore leur originalité,