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ne faut-il pas que les idiomes celtiques soient défigurés pour avoir rendu cette démonstration si lente et si laborieuse ! Combien ne faut-il pas que d’éléments hétérogènes se soient mêlés à leur contexture pour leur avoir donné un extérieur si différent de celui de toutes les langues de leur famille ! Et, en effet, une invasion considérable de mots étrangers, des mutilations nombreuses et bizarres, voilà les éléments de leur originalité.

Tels sont les dégâts accomplis dans le sang, les croyances, les habitudes, l’idiome des Celtes, par la population esclave qu’ils avaient d’abord soumise, et qui ensuite, suivant l’usage, les pénétra de toutes parts et les fit participer à sa dégradation. Cette population n’était pas restée et ne pouvait rester longtemps reléguée dans son abjection, loin du lit de ses maîtres. Les Celtes, par des mariages contractés avec elle, firent de bonne heure éclore, de leur propre abaissement, des séries nouvelles de capacités, d’aptitudes, et par suite de faits, qui ont, à leur tour, servi et serviront de mobile et de ressort à toute l’histoire du monde. Les antagonismes et les mélanges de ces forces hybrides ont, suivant les temps, favorisé le progrès social et la décadence transitoire ou définitive. De même que dans la nature physique les plus grandes oppositions contribuent mutuellement à se faire ressortir, de même ici les qualités spéciales des alliages jaunes et blancs forment un repoussoir des plus énergiques à celles des produits blancs et noirs. Chez ces derniers, sous leur sceptre, au pied de leurs trônes magnifiques, tout embrase l’imagination, la splendeur des arts, les inspirations de la poésie s’y décuplent et couvrent leurs créateurs des rayons étincelants d’une gloire sans pareille. Les égarements les plus insensés, les plus lâches faiblesses, les plus immondes atrocités, reçoivent de cette surexcitation perpétuelle de la tête et du cœur un ébranlement, un je ne sais quoi favorable au vertige. Mais, quand on se retourne

    même rapport, des familles de langues étrangères au sanscrit. Tous leurs idiomes proviennent uniquement de mutilations et de pertes. (Ouvr. cité, p. 195.)