Page:Gobineau Essai inegalite races 1884 Vol 2.djvu/18

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ethnique et morale de ce que nous avons observé dans l’Inde, en Perse et en Égypte. Nous allons faire de même l’application de ce contraste aux nations de la Grèce méridionale. La différence sera plus saillante à mesure que nous passerons du continent dans les îles et des îles dans les colonies asiatiques.

Je me suis servi, il n’y a qu’un instant, de l’Iliade pour caractériser le génie tout à la fois arian et finnique des Grecs du nord. Je n’y puise pas de moindres secours lorsque je cherche à me représenter l’esprit arian-sémitique des Grecs du sud, et il me suffira, dans ce but, d’opposer à Achille et à Pyrrhus le sage Ulysse. Voilà bien le type du Grec trempé de phénicien ; voilà l’homme qui nommerait certainement, dans sa généalogie, plus de mères chananéennes que de femmes arianes. Courageux, mais seulement quand il le faut, astucieux par préférence, sa langue est dorée, et tout imprudent qui l’écoute plaider est séduit. Nul mensonge ne l’effraye, nulle fourberie ne l’embarrasse, aucune perfidie ne lui coûte. Il sait tout. Sa facilité de compréhension est étonnante, et sans bornes sa ténacité dans ses projets. Sous ce double rapport, il est Arian.

Poursuivons le portrait.

Le sang sémitique parle de nouveau en lui, quand il se montre sculpteur : lui-même il a taillé son lit nuptial dans un olivier, et cet ouvrage incrusté d’ivoire est un chef-d’œuvre. Ainsi éloquent, artiste, fourbe et dangereux, c’est un compatriote, un émule du pirate-marchand né à Sidon, du sénateur qui gouvernera Carthage, tandis qu’ingénieux à trouver des idées, inébranlable dans ses vues, habile à gouverner ses passions autant qu’à tempérer celles des autres, modéré quand il le veut, modeste parce que l’orgueil est une enflure maladroite de la raison, c’est un Arian. Il n’y a pas de doute qu’Ulysse doit l’emporter sur Ajax, véritable Arian Finnois. La nuance du type grec à laquelle appartient le fils de Laërte est destinée à une plus haute, plus rapide, mais aussi plus fragile fortune, que son opposite. La gloire de la Grèce fut l’œuvre de la fraction ariane, alliée au sang sémitique ; tandis que la grande prépondérance extérieure de ce pays résulta de l’action des populations quelque peu mongolisées du nord.