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interprète qui lui en a donné le sens. Ils étaient tracés, suivant ce secrétaire, en caractères grecs, c’est-à-dire en caractères qui ressemblaient fort aux grecs, mais la langue était gallique. L’apparence a suffi au dictateur, et, comme il regardait comme indubitable que les alphabets italiotes et étrusques étaient d’origine grecque, malgré leurs déviations de ce type, quand il a vu un ensemble qu’il ne comprenait pas, mais où son œil démêlait les mêmes analogies, il a conclu et dit ce qu’il a dit (1)[1]. Du reste, cette explication n’est pas facultative : il n’y a pas à hésiter : les monuments récemment découverts ont fait connaître les alphabets en usage, antérieurement aux Romains, chez les Salasses de la Provence, chez les Celtes du Saint-Bernard, chez les montagnards du Tessin : tous ces modes d’écriture sont originaux, ils n’ont que des affinités lointaines avec le grec (2)[2].

Je ne nie pas en effet que, si l’alphabet ou les alphabets celtiques ne sont pas grecs, ils ne soient placés, à l’égard de l’alphabet hellénique, dans des rapports très intimes, en un mot, qu’ils ne puissent se reporter tous, eux et lui, à une même source. Ce ne sont pas des copies, mais ils se forment sur un même système, sur un mode primordial, antérieur à eux-mêmes comme au type hellénique, et qui leur a fourni leurs apparences communes, en même temps qu’un mécanisme identique.

L’ancien alphabet grec, celui qui, au dire des experts, fut employé le premier par les nations arianes helléniques, était composé de seize lettres. Ces lettres ont, il est vrai, des noms



(1) Denys d’Halicarnasse raconte comme un fait admis que l’alphabet avait été apporté chez les Italiotes par les Pélasges arcadiens. Il ne tient nul compte des différences extrêmes que chacun peut remarquer entre les lettres grecques et celles de la Péninsule. (Dionys. Halic., Antiq. rom., 1, XXXIII.) — C’était un axiome scientifique, indiscutable pour les lettrés grecs et romains, que tout, le bien, le mal, les vertus et les vices, l’ennui et le plaisir, l’art de marcher, de manger et de boire, avait été inventé dans l’Hellade et s’était de là répandu sur le reste du monde. Homère et Hérodote, comme Hésiode, sont complètement étrangers à cette puérile doctrine.

(1) Mommsen, Die nordetruskischen Alphabete.

  1. (1) Denys d’Halicarnasse raconte comme un fait admis que l’alphabet avait été apporté chez les Italiotes par les Pélasges arcadiens. Il ne tient nul compte des différences extrêmes que chacun peut remarquer entre les lettres grecques et celles de la Péninsule. (Dionys. Halic., Antiq. rom., 1, XXXIII.) — C’était un axiome scientifique, indiscutable pour les lettrés grecs et romains, que tout, le bien, le mal, les vertus et les vices, l’ennui et le plaisir, l’art de marcher, de manger et de boire, avait été inventé dans l’Hellade et s’était de là répandu sur le reste du monde. Homère et Hérodote, comme Hésiode, sont complètement étrangers à cette puérile doctrine.
  2. (1) Mommsen, Die nordetruskischen Alphabete.