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Du silence des Grecs sur ce point, et de ce qu’ils ont toujours semblé considérer ces peuples comme pareils à eux-mêmes, sauf la rusticité, j’induis encore que les Thraces n’étaient pas des Finnois.

Si l’on avait conservé d’eux quelque monument figuré certain pour les époques vraiment anciennes, voire seulement des débris de leur langue, la question serait simple. Mais de la première classe de preuves, on est réduit à s’en passer tout à fait. Il n’y a rien. Pour la seconde, on ne possède guère qu’un petit nombre de mots, la plupart allégués par Dioscoride (1)[1].

Ces faibles restes linguistiques semblent autoriser à assigner aux Thraces une origine ariane (2)[2]. D’autre part, ces peuples paraissent avoir éprouvé un vif attrait pour les mœurs grecques. Hérodote en fait foi. Il y voit la marque d’une parenté qui leur permettait de comprendre la civilisation au spectacle de laquelle ils assistaient ; or l’autorité d’Hérodote est bien puissante (3)[3]. Il faut se rappeler, en outre, Orphée et ses travaux. Il faut tenir compte du respect profond avec lequel les chroniqueurs de la Grèce parlent des plus anciens Thraces, et de tout cela on devra conclure que, malgré une décadence irrémédiable, amenée par les mélanges, ces Thraces étaient



qui a trait au jeune Smerdiès, esclave issu de cette nation, aimé de Polycrate de Samos et d’Anacréon. Il était surtout remarquable par sa chevelure, que le tyran lui fit couper pour faire pièce au poète. Le nom même de Smerdiès est arian.

(1) Dioscor. lib. octo græce et latine, in-12, Paris, 1589, 1 IV, cap. XV. — Voir aussi quelques mots dans Strabon : καπνοβάται, scansores fumi ; κτίσται, conditores ; ἄβιοι, absque fœminis viventes. (VII, 33, etc.)

(2) M. Munch trouve à tous les mots thraces une physionomie décidément indo-européenne. (Trad. all. de Claussen, p. 13.) Suivant cet auteur, on les rapproche aisément de racines lettones et slaves. (Ibid.) Plusieurs noms de lieux thraces sont clairement arians, comme, par exemple, le mot Hémus, corrélatif au sanscrit hima, neige. — D’après Athénée, 13, 1, Philippe de Macédoine, père d’Alexandre, avait épousé Méda, fille d’un certain Κιθήλα, Thrace. — Étienne de Byzance nomme cette femme Γέτις. Jornandès nomme le père Gothila, et la fille Medopa. Tous ces mots sont arians, mais l’époque où on les trouve est assez basse.

(3) Il n’hésite pas, non plus, un instant, à les confondre absolument avec les Gètes, Arians incontestables. (V, 3.)

  1. (1) Dioscor. lib. octo græce et latine, in-12, Paris, 1589, 1 IV, cap. XV. — Voir aussi quelques mots dans Strabon : καπνοβάται, scansores fumi ; κτίσται, conditores ; ἄβιοι, absque fœminis viventes. (VII, 33, etc.)
  2. (2) M. Munch trouve à tous les mots thraces une physionomie décidément indo-européenne. (Trad. all. de Claussen, p. 13.) Suivant cet auteur, on les rapproche aisément de racines lettones et slaves. (Ibid.) Plusieurs noms de lieux thraces sont clairement arians, comme, par exemple, le mot Hémus, corrélatif au sanscrit hima, neige. — D’après Athénée, 13, 1, Philippe de Macédoine, père d’Alexandre, avait épousé Méda, fille d’un certain Κιθήλα, Thrace. — Étienne de Byzance nomme cette femme Γέτις. Jornandès nomme le père Gothila, et la fille Medopa. Tous ces mots sont arians, mais l’époque où on les trouve est assez basse.
  3. (3) Il n’hésite pas, non plus, un instant, à les confondre absolument avec les Gètes, Arians incontestables. (V, 3.)