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transportant les blocs de granit, et tirant du minerai d’or des entrailles de la terre. C’est surtout en Allemagne que l’on raconte des aventures de ce dernier genre. Presque toujours ces ouvriers laborieux ont donné lieu à la remarque qu’ils étaient singulièrement chauves. On se rappellera ici que la débilité du système pileux est un trait spécifique chez la plupart des Finnois.

Dans maintes occasions, ce ne sont plus des mineurs que l’on a surpris occupés à leur travail nocturne, mais des fileuses décrépites ou bien de petites lavandières battant le linge de tout leur cœur, sur le bord du marécage. Il n’est même pas besoin que le villageois irlandais, écossais, breton, allemand, scandinave ou slave, sorte de chez lui pour faire de pareilles rencontres. Bien des nains se blottissent dans les métairies, et y sont d’un grand secours à la buanderie, à la cuisine, à l’étable. Soigneux, propres et discrets, ils ne cassent ni ne perdent rien, ils aident les servantes et les garçons de ferme avec le zèle le plus méritoire. Mais de si utiles créatures ont aussi leurs défauts, et ces défauts sont grands. Les nains passent universellement pour être faux, perfides, lâches, cruels, gourmands à l’excès, ivrognes jusqu’à la furie, et aussi lascifs que les chèvres de Théocrite. Toutes les histoires d’ondines amoureuses, dépouillées des ornements que la poésie littéraire y a joints, sont aussi peu édifiantes que possible (1)[1].

Les nains ont donc, par leurs qualités comme par leurs vices, la physionomie d’une population essentiellement servile, ce qui est une marque que les traditions qui les concernent se sont primitivement formées à une époque où, pour la plupart du moins, ils étaient déjà tombés sous le joug des émigrants de race blanche. Cette opinion est confirmée, ainsi que l’authenticité des récits de la légende moderne, par les traces très reconnaissables, très évidentes, que nous retrouvons de tous les faits qu’elle indique et attribue aux nains, de tous, sans exception aucune, dans l’antiquité la plus haute. La philologie,

  1. (1) Ces contes ont cours en Allemagne, absolument comme en Écosse et en Bretagne.