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que, si la première voulait sincèrement se marier, elle ne manquerait pas d’accepter un enlèvement que le comte Foscari ne se ferait, lui, aucun scrupule de proposer. Il se promit donc bien de veiller à ce que cela n’eût pas lieu ; et, pensant qu’il ne pouvait trop se hâter, il se rendit au château. Comme il faisait nuit close, la porte en était fermée ; Matteo fit le tour du bâtiment. en se tenant pourtant à quelque distance et sous les arbres, afin de n’être point vu. Tout à coup, à quelques pas de lui, il aperçut le comte Jean, qui s’avançait avec précaution vers une partie de l’édifice qui faisait face à l’endroit où était caché le saltimbanque. Arrivé là, le Vénitien fit un signal, une fenêtre s’ouvrit ; à la clarté des étoiles, Matteo reconnut parfaitement Paula ; le comte, en s’aidant d’une treille, escalada le mur, arriva à la fenêtre et sauta dans la chambre. "Comme j’ai bien fait de venir ! pensa le Cigoli. Je vais les laisser dans cet appartement tant qu’ils voudront ; mais, s’ils essayent d’en sortir, je me mets à crier au voleur, et il faudra bien que le comte lâche sa proie."

Il finissait à peine cette réflexion mentale que, d’un autre coin du parc, s’avança un second personnage : c’était Corybante. Il regarda la fenêtre, poussa un profond soupir et, comme un homme qui accomplit un devoir pénible à bien des titres, il s’accrocha aux barreaux de l’espalier et grimpa dans la chambre, comme le patricien l’avait fait avant lui. "Il parait décidément que cette chambre