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Tartaglia, avec le directeur de l’Opéra.

— Je te casse la tête si tu parles de ce damné théâtre, dit Matteo furieux et brandissant une chaise au-dessus du crâne du malencontreux jaloux ; quelle que soit la raison que j’en aie, je veux aller et j’irai à Venise.

Il prit son chapeau et sortit pour se rendre au palais et demander au grand-duc un congé pour lui et pour sa troupe ; je dis sa, car il en était directeur, et c’était justice. Si Polichinelle, en costume civil, pouvait se pavaner dans un bel habit de velours coquelicot, si le sombre Tartaglia avait pu garnir de verrous dans toute sa hauteur la porte de ces dames, si ces dames elles-mêmes prodiguaient tout le satin, la soie, le brocart, les fleurs et la toile d’argent dans leurs atours, c’était incontestablement à l’esprit incomparable du cent fois spirituel Scaramouche que tous en étaient redevables.

Le duc reçut Matteo gracieusement, comme à son ordinaire.

— Eh bien, dit Son Altesse, trop délicieux Scaramouche, que nous veut Votre Jovialité ?

— Monseigneur, répondit le saltimbanque touché de cette bonté parfaite, et s’inclinant avec émotion sur la main de l’illustre prince, j’oserai solliciter de Votre Altesse un moment d’entretien ?

— Volontiers Matteo. Messieurs, dit-il à ses courtisans, laissez-nous seuls un peu.

On put voir de loin le comédien s’exprimer avec les gestes d’une personne qui raconte. Le prince