une autre demande, et comme je l’ai trouvée de beaucoup la plus importante, j’y réponds en dernier. Vous excuserez la liberté avec laquelle je vais vous parler de votre maison ; je sais que les Européens ne sont pas sur ce point-là aussi délicats que nous, et je les approuve, car il y a beaucoup de grimace dans notre prétendue réserve et, en outre, je suis un père de famille ; j’ai quatre filles mariées qui ont des enfants, et je vous parlerai de votre femme comme d’une fille à moi, puisque vous avez eu la confiance de me consulter à propos d’elle.
— Kerbelay-Houssein, vous êtes un digne homme, répliqua Valerio ; je vous écoute avec toute attention et une confiance entière.
— Pour commencer, vous avez eu tort d’emmener votre maison avec vous dans le voyage que vous entreprenez. Je m’imagine assez ce que sont vos femmes ; elles ne ressemblent point aux nôtres ; j’ai vu cela du coin de l’œil dans les villes habitées par des Féringhys. Les nôtres ? On en met deux sur un mulet, une à droite, l’autre à gauche, avec une toile bleue par-dessus et trois ou quatre enfants sur leurs genoux. Elles bavardent et dorment, on ne s’en inquiète pas. Si ce sont de très-grandes dames, on leur donne, au lieu de ces kedjavèhs, un takht-è-révan, une grande boîte portée sur deux bêtes, l’une devant l’autre derrière ; cela tangue et roule comme un vaisseau ; elles sont fort bien là-dedans. Mais vos femmes sont trop raffinées ; vous leur apprenez tant de choses, vous les gâtez si fort, qu’il est impossible de les traiter de cette façon-là. Mon avis est donc qu’elles ne doivent pas venir dans nos pays, où il n’existe pas de voitures, pas de beaux meubles, et où, en revanche, on a trop de soleil, trop de chaleur ou trop de froid, beaucoup de fatigues, et elles n’y peuvent tenir.
— Que signifie cette crainte que vous voulez me donner, Kerbelay-Houssein ? répondit-il. Grâces au Ciel, ma femme est forte, bien portante et jusqu’ici elle s’est accommodée de tout et n’a souffert de rien.
— Sans doute, sans doute ! Gloire à Dieu qu’il en ait été ainsi ; mais voilà que les difficultés commencent. Enfin, tout ira bien, inshallah ! inshallah ! Je ne veux pas vous effrayer sans raison, effendum, mais