chambre. Les murs en étaient peints en blanc, et les enfoncements réguliers, carrés, où l’on place des coffrets et des vases de fleurs étaient encadrés dans des peintures rose et or, relevées de vert clair. Le lit était garni d’immenses couvertures piquées en soie rouge ; des oreillers et des coussins, grands et petits, recouverts de fine toile et brodés étaient multipliés sous sa tête et sous ses bras. Il était gardé par une négresse, vieille à la vérité et laide, mais très-bienveillante, qui obéissait à chacune de ses demandes, qui le dorlotait, qui l’appelait l’oncle de son âme et qui ne ressemblait nullement à un bourreau. Deux ou trois fois par jour, il recevait la visite d’un hakim-bachi ou médecin en chef, lequel était juif, bien connu de lui pour le praticien à la mode dans le beau monde et il ne pouvait s’empêcher de convenir en lui-même que le seul fait d’être traité par Hakim-Massy constituait déjà un véritable honneur dont on pouvait être fier. Hakim-Massy lui avait dit, avec sa bonté ordinaire, que tout allait au mieux, qu’il serait sur pied avant peu de jours et que sa guérison marcherait d’autant plus vite que la persuasion lui viendrait de n’avoir plus rien à craindre des parents de Kérym, ni du Roi, ni de personne. Ces assurances venant d’un personnage aussi distingué que Hakim-Massy ne laissaient pas que de faire impression sur le jeune homme, et comme la négresse le confirmait toute la journée, le trouble de son imagination se remettait peu à peu. Lorsque le malade fut en état de prendre goût aux distractions, il fut visité par un moulla fort aimable qui le félicita de son heureux destin ; par un marchand très connu au bazar qui lui offrit une jolie bague de turquoises, par un cousin au septième degré du chef de la tribu des Sylsoupours qui l’invita à venir chasser chez lui au faucon, aussitôt qu’il se trouverait tout à fait remis. Dès qu’il commença à se lever, il apprit de sa négresse qu’il avait quatre domestiques à son service et pouvait demander sans crainte ce qui lui serait agréable.
— Mais, tante de mon âme, s’écria enfin Gambèr-Aly, qui suis-je donc ? Qui êtes-vous ? Est-ce que par hasard, on m’aurait coupé le cou sans que je m’en aperçusse ? Suis-je déjà dans le paradis ?