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LES PLÉIADES

LIVRE PREMIER


CHAPITRE PREMIER

JOURNAL DE VOYAGE DE LOUIS DE LAUDON

Il était six heures du soir à peu près, peut-être six et demie. La malle-poste filait entre la double ligne des chalets avec une verve renouvelée ; nous sautions sur les inégalités du pavé ; les bonnes gens se mettaient aux fenêtres ; ceux de la rue relevaient le nez avec une expression d’intérêt et de curiosité.

Enfin la machine roulante contint sa turbulente gaieté ; les chevaux, couverts de sueur et exhalant de leurs robustes croupes des nuages de vapeur, prirent le trot, puis le pas, et, soudain, s’arrêtèrent en désordre devant le perron de l’hôtel de la Poste. Nous étions à Aïrolo, avec quelque prétention d’y faire un dîner quelconque.

Conrad Lanze sauta à terre, et moi, riant de bon cœur à le voir saupoudré de poussière et blanc comme un