Page:Gobineau - Les Pléiades, 1874.djvu/31

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

l’occasion, user de générosité avec ce reste, mais de générosité seulement ; et maintenant, s’il vous plaît, descendons de ces hauteurs. La nuit s’avance, il serait ridicule de prolonger trop longtemps dans la matinée le repos auquel nous avons droit. Comme nous errions dans les limbes depuis ce matin, aucun des trois n’a demandé aux autres ce qu’il comptait faire demain. Il est temps de le savoir.

— Pour moi, répondit Laudon, je vais à Milan ; je dois y trouver des lettres, et de Milan il est vraisemblable que je me rendrai sans presse à Burbach, pour y arriver vers l’automne.

— À Burbach ? demanda Lanze, avec un accent manifeste d’intérêt. Y connaissez-vous quelqu’un ?

— J’y connais le prince régnant, avec lequel j’ai eu l’honneur de chasser quelquefois ; c’est lui que je vais voir.

— Moi aussi, j’irai, je pense, à Burbach, à cette époque, dit Conrad, après un court instant d’hésitation. D’abord je suis de cette ville, puis le prince m’a confié des travaux ; quand j’aurai passé quelques semaines à Florence, je retournerai chez moi sans doute, j’y serai avant vous.

— Puisqu’il en est ainsi, s’écria Wilfrid Nore ; je prendrai mon parti. Vous, Lanze, vous êtes un homme qui avez une occupation. Vous, Laudon, peut-être vous croyez-vous dans le même cas, ce qui revient presque au même ; quant à moi, je ne nourris pas cette illusion. Rien ne m’oblige, à tourner à droite plutôt qu’à gauche, au midi plutôt qu’au septentrion ; en conséquence, j’accompagnerai celui de vous deux qui voudra de moi, jusqu’au moment où ce guide indulgent jugera opportun de se rendre au rendez-vous que vous vous êtes assigné, et à cette heure