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or, argent, et n’avait lui-même que trois pouces de long. La composition totale du chef-d’œuvre formait un manuscrit de dix pages :

« Eh bien ! mon auguste et sage cousin, que fait Votre Grandeur ? Sachez que depuis votre aimable déclaration que vous ne viendriez pas à Wildenham nous raconter vos méfaits mexicains, je me suis amusée au delà de toute expression possible. Votre originalité affectée nous manquant, nous en avons été dédommagés par une invasion des originalités les plus véritables. Nous possédons de tout : des élégants de la première volée, des artistes, des militaires, des hommes politiques et un poëte assez bon joueur de whist. Tous les soirs, c’est, dans le salon de ma respectable mère, un concert de platitudes à mourir de joie. Le gagnant du Derby de cette année m’a demandé ma main ! Je le trouve assez bon pour coquetter avec lui ; mais tout me fait prévoir qu’à la fin je me déciderai pour un autre de nos hôtes dont je ne vous dirai pas le nom, afin de vous intriguer. Il est bien honnêtement amoureux de votre servante, celui-là ! Avant de dire oui tout à fait et sans rémission, il n’est cependant pas impossible que je vous soumette l’état de la question, pour m’éclairer de vos incomparables lumières. Seulement n’y comptez pas trop. Croyez-vous absolument nécessaire de faire le bonheur de quelqu’un, lorsqu’on est surtout résolue à faire le sien propre ? C’est subtil ce que je vous demande, mais, en même temps, pratique comme tout ce que vous devez attendre d’une personne aussi parfaitement distinguée et bien élevée que celle qui a l’honneur de se dire, mon cher Wilfrid, votre dévouée cousine,

« Gwendoline Nore. »