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qu’il y a de passion dans sa tendresse pour moi m’oblige à un sacrifice, le plus grand que je puisse faire, assurément ! celui de me séparer pour un temps d’une enfant si chère et qui jusqu’à présent ne m’avait jamais quittée !

De son côté, Adélaïde disait à qui voulait l’entendre: ma mère sera certainement malheureuse avec M. de Rothbanner; elle n’eût pas dû se remarier; mais ce n’est pas à moi, sa fille, qu’il appartient de la blâmer; je ne puis voir et je ne vois que ses périls ! C’est la meilleure des mères ! Quoi qu’elle fasse, par un sentiment exagéré de son affection, je sais que je lui suis indispensable. Je lui sacrifierai ma vie ! Je ne veux qu’elle ! je n’aime qu’elle ! Je retournerai auprès d’elle et je ne me marierai jamais !

Elle se mit en devoir de tenir parole. On lui présenta, vous vous en souvenez peut-être, Philippe de Rubeck: soixante mille florins de revenus en biens-fonds, beau nom, trente-cinq ans, jolie figure !. Elle le refusa. A la suite comparurent deux ou trois autres prétendants qui n’étaient guère moins convenables. Ils furent évincés de même. La grande-duchesse s’en mêla et fit venir Adélaïde pour la sermonner. Celle-ci pleura excessivement, demanda sa mère, voulut sa mère, eut une attaque de nerfs, si bien que notre excellente souveraine n’y voyant que du feu, se tourna tout entière au parti d’Adélaïde et dit à une ou deux reprises que madame de Rothbanner n’avait pas raison.