FÉVRIER. LES ROMANS 31
épisodes, sont fort palpitants, mais il y en a trop vrai- ment, et l'intérêt du lecteur sans cesse sollicité, risque à la longue d'être déconcerté. Je l'ai déjà dit, c'est là un beau défaut que je souhaiterais à bien des roman- ciers, mais tout de même, M^^^ Bouyer-Karr aurait intérêt à s'en méfier, et à discipliner un peu sa riche imagination.
Tel qu'il est, ce roman, fort intéressant à lire, pré- sente pour moi l'inconvénient majeur d'être à peu près impossible à analyser ; comment pourrais-je, en effet, me débrouiller au milieu de cette théorie de « pauvres diables » que M^^ Bouyer-Karr a fait recueillir et sauver par sa généreuse et noble héroïne M"^ Isabeau Roux? Elle a fort à faire, cette noble femme, au I Milieu de tous ces déshérités qui ne sont pas tous très if'commandables. Quelques-uns ont d'assez fâcheuses actions sur la conscience, la plupart ont dans leur vie des aventures dramatiques et même mélodramatiques ; mais tous sont sacrés par l'infortune. Et, à force de persévérance et de charité intelligente, Isabeau par- vient, sous le ciel clément de la douce Provence, à mettre un peu de bonheur et de paix dans toute cette détresse et à conquérir un inestimable trésor : la « joie mise par elle dans tant de pauvres yeux ».
Et cette belle figure de femme, qui domine tout le roman, qui lui donne le sens d'un hymne à la bonté souveraine, suffirait — s'il en était besoin — à plaider et à gagner sa cause.
RENÉ PERROUT
Goëry Coquart, Bourgeois d'Épinal.
La course éperdue que le chroniqueur doit fournir chaque semaine à la poursuite des livres nouveaux qui