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de la canonicité.

l’Iliade en vingt-quatre chants, bien que ce poème fût susceptible d’autres divisions.

Ce Canon, admis aujourd’hui par les Juifs, a donné lieu d’examiner quelles en sont la disposition et l’origine ; à qu’elle époque il a été fermé ; quel en est l’auteur ; en quoi consiste le travail d’Esdras sur les Ecritures.


QUESTION PREMIÈRE.
Quelle est la disposition du Canon des Juifs ?

Les Juifs divisent en trois classes les vingt-quatre livres de l’Ancien Testament qui composent leur Canon. La première, qui contient les cinq livres de Moïse, se nomme Tôrâ (תורה), mot qu’on rend ordinai- rement par loi, mais qui, dans la réalité, a une signification plus étendue ; car il répond à l’idée de doctrine, enseignement, instruction. La seconde, qui renferme Josué et les livres suivants jusqu’à Malachie, le dernier des petits prophètes inclusivement, s’appelle Nebîîm (נביאים), c’est-à-dire Prophètes[1]. La troisième, contenant tous les autres livres, est désignée sous le nom de Kethoubîm (כתובים) ou Ecrits par excellence, c’est-à-dire des Ecrits divins ; idée qui rend parfaitement le terme consacré Agiographes ou mieux Hagiographes. Or on appelait ainsi ces derniers, parce qu’ils avaient pour auteurs des écrivains qui, quoique divinement inspirés, n’avaient pourtant pas le caractère général des prophètes proprement dits. Pour compléter l’expression, les rabbins ont ajouté : écrits par l’Esprit saint (כרוח הקודש). C’est ainsi que les pères de l’Eglise[2] disaient également grâphéîa (γραφεῖα) ou hagiographa (ἁγιόγραφα).

Cette distribution des livres en trois classes se trouve très-fréquemment dans le Talmud, et saint Jérôme nous atteste que telle était la distribution consacrée chez les Juifs[3]. En remontant plus haut, nous trouvons cette même division dans Philon, Joseph, le Nouveau Testament, et dans le Prologue de l’Ecclésiastique[4]

Saint Jérôme, en désignant chacune de ces classes, cite les livres l’un après l’autre dans l’ordre que nous voyons suivi dans les Bibles hébraïques des Juifs. Mais Joseph n’est pas aussi explicite, il se borne à dire

  1. Dans les Bibles hébraïques, les נביאים sont subdivisés en ראשונים (Rischônîm) premiers ou antérieurs, qui sont Josué et les livres suivants, jusqu’au deuxième des Rois inclusivement ; et en אחרונים (Aharônim) derniers ou postérieurs, qui sont Isaïe, Jérémie et les autres, jusqu’aux Psaumes exclusivement.
  2. Voy. Suicer. Thes. Eccles. à ces mots.
  3. Hier. Prolog. Galeat.
  4. Philo, Tom. II, p. 475. Jos. Contr. Ap. lI, § 8, Luc. XXIV, 44.