dans l’ombre, mais tout près de la tache de soleil qui couvait leurs œufs, comme un oiseau mâle près de sa femelle. Entre des arbustes qu’on devinait épices, des herbes qu’on devinait légumes ; des fleurs qu’un instinct me poussait à goûter, qui avaient goût de porcelet, qui étaient nourrissantes. De grandes fleurs pleines d’eau de pluie à la cannelle où je pouvais boire par une paille…, et mes mains, après une matinée dans l’île, sentaient tout ce que sentent, le premier matin de son apprentissage au bar, les mains de la barmaid.
Pour que tout malentendu fût dissipé aussi entre la Providence des parfums et moi, la brise me vaporisait de toutes les odeurs de l’île. Il y en avait de familières, que je retrouvais aussi nettes qu’autour de leur flacon, Rose d’Orsay, Ambre Antique, le Mouchoir de Monsieur ; mais surtout de plus étranges, que je sentais pour la première fois et qui agitaient en moi, à défaut de vrais souvenirs, à vide, la mémoire d’une sauvage. Elles s’attachaient à vous, on devinait qu’elles n’étaient pas stériles, comme en Europe, qu’elles se déposaient sur vous dans un but choisi par la nature. Chaque parfum me poussait hors de son bosquet somme si j’avais à le fuir. J’allais, prenant sans m’en douter l’île dans sa longueur, allant d’instinct vers le promontoire qui l’avait jadis ratta-